La Reconquête de Sabrine Kasbaoui

comédiennes de "spéculum"

Au téléphone avec Sabrine Kasbaoui : réalisatrice, journaliste Reporter d’Images, amoureuse de l’art et de l’information, femme et sorcière. Entre ses pas et nos voix, elle vous présente son premier long-métrage : « La Reconquête ». Documentaire et débat à l’exposition et spectacle vivant The Patriarchy is burning du collectif Gang Of Witches le 16 juin à 17 heure au Palais de Tokyo à Paris.

Il s’agit de la libération de la parole des femmes sur les réseaux sociaux, des violences gynécologiques et obstétricales. Ainsi, espérer faire évoluer les pratiques des soignants. Pour les femmes. Réalisé en deux mois et demie et monté en 14 jours, Sabrine Kasbaoui prend la température d’un moment.

Convergence des luttes, rassemblement de femmes, libération de la parole, clitoris dans les rues, clitoris sur les réseaux, clitoris dans notre lit, clitoris et plaisir  : les femmes se connaissent et se reconnaissent. Enfin. Et c’est à travers Gang Of Witches, gang artistique féministe et écologiste et son festival artistique « Patriarchy is burning » que la journaliste exprime son rapport au corps, à la gynécologie, à la sexualité, à l’égalité, à nous, aux femmes. L’exposition et spectacle vivant présente son troisième chapitre d’un cycle débuté en 2017. Véritable festival pluridisciplinaire, livre et album éponymes. Les peintres, sculpteurs, écrivains, photographes, vidéastes, musiciens.e, danseurs.e, performeurs.e envoient « le patriarcat au bûcher ». Les thèmes abordés sont ceux de la violence faites aux femmes, de la masculinité libérée des injonctions patriarcales. Et interroge les codes du genre pour une prise de conscience globale vers plus d’égalité et de diversité.

Engagée. C’est en 2018 lorsqu’elle réalise son premier court-métrage en suivant les deux fondatrices Paola Hivelin et Sophie Rokh qu’elle entre enfin dans l’aventure Gang Of  Witches : «Je me suis intéressée l’année dernière à la figure de la sorcière. J’ai découvert dans un ouvrage de Silvia Federici “Caliban et la sorcière” cette figure et la manière dont on se la réapproprie. Normalement la sorcière, c’est plutôt une image négative. Alors que depuis les années 70, elle devient une  icône positive, une femme libre, indépendante, puissante. J’ai trouvé ça intéressant de prendre conscience de ce changement, comment cela s’incarne aujourd’hui. Dans ce court-métrage, la sorcière, icône féministe s’incarne à travers les artistes. Puis c’est aussi exprimer une sorte de sororité, l’idée de rassemblement entre les créatrices de Gang of Witches. »

Pour elle, l’image de la sorcière a été une étape importante, une construction intellectuelle nouvelle et essentielle : « La sorcière c’est celle qui est entre les cases, entre les mondes et qui peut rassembler les êtres ». « La Reconquête » qui sera diffusé au palais de Tokyo le 16 juin à 17h, c’est aussi des réponses à des questions, un débat. Notre désir est réellement notre désir ou est-il celui de la constructions sociale ? : «  J’ai 36 ans, je suis célibataire et je n’ai pas d’enfants. Les injonctions par rapport à la maternité, je les vis au quotidien. Je me suis interrogée sur la nature de mon désir d’enfant. ».

La Reconquête c’est l’idée que la femme retrouve son corps, qu’elle le chérisse et le connaisse. Sache au même titre que les hommes, ce que son corps est et ce qu’il lui faut : « C’est  en discutant avec les femmes que je rencontrais que je me suis rendue que c’était un point dont on parle peu mais qui cristallise beaucoup de choses. C’est-à-dire que lorsqu’on parle de gynécologie, on parle d’un domaine de la médecine très marqué par les opinions avec une forme de conservatisme patriarcale. Cela s’explique par l’histoire, la transmission. C’est un point à changer. Il faut reprendre le contrôle de nos corps. “

Par exemple, des pratiques comme l’épisiotomie (acte chirurgicale consistant à ouvrir le périnée au moment de l’accouchement afin de laisser passer l’enfant) sont dangereuses et pourtant toujours pratiquées : “Comme l’explique Marie-Hélène Lahaye dans son livre « Accouchement les femmes méritent mieux » les médecins continuent cette procédure parce qu’ils ont appris ça tel quel. Pourquoi on continue de pratiquer quelque chose qui est déconseillé depuis 15 ans ? On applique une opinion et non pas des connaissances. La gynécologie c’est un point qui est encore marqué par le patriarcat et cette ambition de contrôler le sexe et le ventre des femmes. »

C’est une cape d’invisibilité qui couvre le corps de la gynécologie depuis trop longtemps : « Il faut reprendre le contrôle de nos corps et de sa connaissance. On doit reprendre la parole. C’est une reconquête et cela passe par des échanges entre femmes. La connaissance doit se diffuser à nouveau entre nous. Les femmes ont longtemps perdu la connaissance de leur corps. On était plus facilement contrôlables. ». Heureusement pour nous depuis près de deux ans, c’est l’effet inverse et la femme reprend ses droits et sa voix. Pour Sabrine Kasbaoui, il s’agit d’accompagner son film le plus possible. Il est son premier long-métrage construit en totale liberté et confiance avec le collectif dont elle fait partie Gang Of Witches. 

Je t’invite grandement à te rendre ce samedi et dimanche 15 et 16 juin au Palais de Tokyo à Paris. Tu y verras l’exposition de Gang Of Witches, ces artistes et ces œuvres, ces idées et ces chants. Et ainsi, voir le documentaire de Sabrine Kasbaoui « La Reconquête » où tu pourras tweeter #payetonuterus. Et participer au débat.

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