Chorégraphe, danseuse, artiste, Pina Bausch a révolutionné le monde de la danse à bien des échelles. Disparue il y a onze ans, elle demeure une figure majeure de la danse contemporaine. Pina Bausch : l’hymne à la danse, notre portrait.
Les premiers pas
Pina Bausch est une chorégraphe allemande considérée, à bien des égards, comme à l’origine de la danse contemporaine et du mouvement de la danse- théâtre. Née le 27 juillet 1940 en Allemagne, elle profite d’une enfance tranquille. Dès son jeune âge, elle prend des cours de danse et participe à quelques spectacles.
C’est à quinze ans qu’elle commence sa formation à la Folkwang-Hochschule d’Essen. C’est à ce moment qu’elle rencontre la danse-théâtre, grâce à son directeur, Kurt Jooss. Cette discipline fait du danseur un comédien. Elle cherche à renforcer la présence de l’artiste, avec un travail sur le personnage, l’expression et les réactions aux situations dramatiques.
Une fois son diplôme (danse de scène et pédagogie de la danse) en poche, Pina part à New-York. Elle est boursière à la célèbre Julliard school. Elle est rapidement repérée et travaille avec de grands chorégraphes comme Paul Taylor. En 1961, elle intègre le New American Ballet du Metropolitan Opera de New-York.
Elle n’y reste cependant qu’un an. Jooss la rappelle en Allemagne et elle devient soliste au Folkwang-Ballett . Elle assiste son maître et fait ses premiers pas en temps de chorégraphe. Les années 1960 sont marquées par de nombreuses tournées à travers l’Europe. C’est en 1968, que Pina Bausch devient chorégraphe. L’année suivante, elle prend la relève de Kurt Jooss et devient directrice artistique de la section danse de la Folkwang-Hochschule jusqu’en 1973 puis de 1983 à 1989.
Pina Bausch, l’hymne à la danse
Si elle signe le début de sa rupture avec la danse conventionnelle par le Sacre du Printemps en 1975, c’est en 1976 qu’elle la consomme définitivement. Elle travaille alors au Wuppertaler Bühnen qu’elle ne quittera plus. Ainsi dès 1980 et jusqu’à sa mort, Pina Bausch connaîtra la reconnaissance de son travail.
La chorégraphe s’inspire des environnements qu’elle visite et découvre. Elle danse la douleur des hommes, qu’elle encre dans la terre nourricière. Son processus créatif implique l’échange avec les artistes. Elle prend en compte et crée par rapport à leur corps et leurs possibilités. Elle allie, dès la moitié des années 1970, la danse à l’opéra, comme dans Orphée et Eurydice. La musique et les chants sont alors des personnages à part entière de son œuvre.
Dans ses mises en scène, elle explore l’harmonie du corps humain et les anatomies de ses différents danseurs. La chorégraphe allemande met à nu les danseurs, les poussant à puiser dans leurs propres émotions pour offrir une danse qui les transcende. Ce qu’elle recherche c’est la diversité aussi bien des corps de des cœurs, des histoires comme des mouvements. Avec Pina Bausch : l’hymne à la danse se dévoile alors.
Pina explore le langage corporel, alliant à la fluidité́ à l’inerte, rythmes changeants, toniques puis interrompus auxquels elle ajoute ses souvenirs personnels, afin de donner à la scène une émotion intense et bouleversante face à cette étude d’une solitude.
Il faut dire que la danse de Pina Bausch est emprunte d’une sourde mélancolique, vision pessimiste du monde qui l’entoure, critique sociale et artistique où entre diffèrent s’apparente à une lutte perdue d’avance. Elle reviendra sur cette position dans ses dernières œuvres jugeant que les gens ne veulent pas venir voir de la danse et en souffrir.
Les personnages de Bausch sont des héros mythologiques dont le destin mortel est scellé; elle leur offre une fin grandiose où les passions humaines se déchainent et se dévoilent, brisant les apparences et les faux-semblants, exposant là la violence des sentiments…
Pina Bausch et le costume
Rolf Borzik, compagnon de la chorégraphe, puis Marion Cito, sont à l’origine des costumes des ballets de Pina Bausch. Le lien étroit et la nécessaire collaboration entre les différents corps de métier dans le milieu de la Scène se dévoile entièrement ici.
Beaucoup ressemblent à des costumes de la ville : des robes courtes, des tailleurs… loin des plumes et des paillettes, des tutus et des couronnes qu’on associe traditionnellement au costume du ballet. Ils font le parallèle avec la vie quotidienne, brisant ainsi, à leur manière, le quatrième mur.
Mais s’y joignent des robes longues, fluides, qui soulignent le corps et renforcent la peinture d’une féminité torturée et en évolution, loin des codes de la société. Inattendus, ils sont alors à l’image du travail de la chorégraphe. Ses costumes ont alors une allure intemporelle, que l’on ne peut raccrocher ni à un genre ou une époque. Ils écrivent le présent.
Pina Bausch prône la libération du corps de la femme et de son esprit. Elle mêle ainsi les traditions du ballet et du théâtre avec sa propre vision… Le vêtement raconte le personnage, lui donne une présence, une histoire…
L’utilisation de la symbolique des couleurs est également très forte et une poésie s’en dégage, soulignant l’essence de la féminité. Grâce à sa simplicité, à ses cultures simples mais impactantes, il s’intègre à la chorégraphie et devient personnage : il est sali, retiré, tiré, et on danse avec lui comme avec un partenaire.
Pina Bausch est donc de ces figures intemporelles. Elle a révolutionné la danse classique contemporaine en se l’appropriant entièrement. Sans cesse d’actualité, elle a su exprimer les mots éternels, qui traversent chaque humain. Pina Bausch a le langage de l’univers et nous le livre en dansant. Pina Baush : l’hymne à la danse sans fin…
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