Qu’est ce qu’un homme ? À cette réponse, multiples sont les réponses. Cependant, le cinéma nous en envoie une en particulier. Celle d’une masculinité toute en puissance, invincible et sans limite. Bref, un homme ne pleure pas et n’a jamais mal. Cette vision s’effrite depuis quelques années. Les codes changent et on se questionne alors sur la masculinité au cinéma.
La vision de l’homme viril, puissant et idéalisé nous vient principalement d’Hollywood. Même si ce cliché est remis en question, ne le conjuguer qu’au passé serait un mensonge. C’est un symbole façonné dès lors qu’Hollywood devint un outil de propagande américaine.
En effet, les États-Unis cherchent à romancer leur histoire. Quoi de mieux alors que les figures des cowboys courageux et des héros dévoués à leur patrie ? La violence masculine devient alors une norme de la masculinité au cinéma. Mais au delà, elle s’inscrit sur la pellicule comme une norme sociale. Un homme qui ne se bat pas, qui refuse la guerre est un poltron, une mauviette, un mauvais Américain.
Hollywood et le fantasme viril
On véhicule l’image lisse d’un homme patriote et dévoué. Il est un matcho sur les bords, dominant car figure d’un patriarcat roi. Au premier plan, il se doit d’être le héros protégeant la veuve et l’orphelin et sauvant son pays. Et cela même en se sacrifiant. On songe alors aux rôles de Clint Eastwood ou de Kirk Douglas, qui dans les années 1950, furent les étendards de ce fonctionnement.
L’homme est ainsi le cerveau et les muscles. Même s’il tient le rôle du méchant, son rôle a plus de profondeur que celui des femmes qui s’évanouissent à la première émotion. C’est bien connu, une araignée et nous voilà dans les vapes. Bref, la masculinité au cinéma associe l’homme à un demi-dieu qui résiste à tout. Sauf aux femmes vénales.
La crise de la masculinité au cinéma
La Guerre du Vietnam et la Guerre Froide embrasent l’hégémonie américaine. Cette fois, la jeunesse qui s’en va en guerre n’a pas foi en ce combat. Elle veut rompre avec l’image traditionaliste et s’oppose à la génération précédente. Cependant, Hollywood réprime cette vague communiste : la faiblesse masculine ne doit être acceptée.
En France, Mai 68 allume les feux. On s’interroge alors sur la figure de la masculinité au cinéma sans pour autant en déconstruire le mythe. S’esquisse pourtant des personnages plus sensibles, plus poètes et moins “virilité de papa”. C’est le cas, par exemple, de Maxence dans les Demoiselles de Rochefort de Demi. Un peintre-poète, soldat malgré lui, qui cherche son idéal féminin. Un rôle tout en subtilité.
Le cinéma des années 1980-1990 signe la remise en cause du genre. Il fait ainsi écho à la crise sociale qui secoue le monde occidental. Le sida frappe, l’homosexualité se révèle, la condition de la femme évolue, la religion perd son emprise… Le cinéma amène ces questionnements sur grand écran.
Mais la grande majorité de l’industrie est essentiellement masculine. Les femmes s’emploient alors à déconstruire près d’un siècle de clichés misogynes et oppressants. On pense ici à Virgin Suicide de Sofia Coppola qui met en scène de jeunes garçons en quête d’identité, plein de doutes… Les films indépendants les rejoignent. Ils détruisent les idées de genre et le héros surpuissant. Matrix offre cette volonté no gender et où la femme est une guerrière au même titre qu’un homme. Désormais, un homme montre ses émotions, sa sensibilité, ses failles. Et c’est tant mieux.
L’homme : une figure paradoxale
Au XXIème siècle, la définition de l’homme est complexe. Ne sont-ils pas aussi perdus, entre toutes ces figures ? La définition d’être un homme nécessite d’être réécrite pour correspondre à notre réalité. Et le cinéma commence à s’y employer. Néanmoins, une tendance paradoxale s’observe.
D’un côté, une industrie plus ouverte, plus inclusive qui nous dit que la masculinité est multiple. On citera ici le film Moonlight avec sa représentation d’une masculinité double, friable. Et sans doute, est-ce celle qui ressemble le plus à la réalité. Et de l’autre, une industrie de profit qui répète les mêmes schémas malgré ses tentatives d’évolution. C’est le cas pour les Avengers. Même si la progression est notable, un long chemin reste encore à parcourir car l’homme sans peur et baraqué est toujours bien présent.
Car aujourd’hui, la masculinité au cinéma passe également par l’inclusion de la femme. Car, pendant longtemps, là où l’homme se réalisait par ses actions, la femme devait attendre de rencontrer l’amour pour progresser dans le récit. On trouve cette opposition notamment dans le traitement des corps. La femme est petite, mince là où l’homme est musclé et grand. Un cliché classique du cinéma d’animation comme dans les mondes de Ralph.
Ainsi, le XXIème ne signe pas la fin d’une figure masculine traditionnelle mais propose une masculinité plus complexe et plus vraie. Déconstruire des schémas de pensée est long. Montrer un homme vulnérable, sensible sans être un guerrier torturé amène une nouvelle génération de cinéastes à sortir des rouages classiques.
Car si le cinéma éduque, il se doit de montrer la diversité de l’homme. La masculinité au cinéma devrait être aussi large, riche et questionnée qu’elle ne l’est en sortant de la salle.
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