La sexualité, pourquoi est-ce si tabou ? À travers les époques, notre perception du sexe a évolué. Même si les pratiques dépendent du lieu de naissance, de la culture ou encore de la religion, les mœurs ne cessent de changer. Comment la vision du sexe a-t-elle progressé ? À quel avenir la sexualité est-elle promise ?
Antiquité : de – 3000 av. J.C. à la chute de l’Empire romain en 476
Durant l’Antiquité, la vision du sexe était totalement phallocentrique. Effectivement, l’acte sexuel n’existait pas sans pénétration. Le plaisir féminin était alors totalement méconnu. En revanche, les distinctions de préférences sexuelles n’étaient pas présentes comme à l’heure actuelle. L’homosexualité n’était pas pointée du doigt parce que le statut social primait davantage, ainsi que le rôle joué dans la relation.
Lorsque l’on s’imagine la sexualité durant l’Antiquité, ce sont les banquets, les coupes remplies de vin et les orgies s’affranchissant de nos limites morales actuelles, qui nous viennent en tête. Pourtant, l’art et la télévision ont nourri ces mythes. L’alimentation romaine et ses prétendues dérives servent ainsi à dénoncer les travers de nos sociétés contemporaines, comme un miroir que l’on regarderait honteusement, écrit Arkhé, une maison d’édition.
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Même si le sexe était plus libre et que le corps était moins tabou, l’orgie fantasmée par notre époque relève du mythe. Le scandale des Bacchanales, affaire politico-religieuse survenue en 186 av. J.C., est à l’origine de l’amplification des rumeurs entourant certaines pratiques sexuelles et religieuses. En effet, la consommation excessive de vin était, à l’époque, le moyen utilisé pour entrer en osmose avec le divin. Les autorités découvrirent que des hommes et des femmes vouaient un culte au dieu Bacchus. Ils se réunissaient régulièrement pour assister à diverses cérémonies où l’on favorisait la vie de débauche, comme le viol, allant jusqu’au meurtre en cas de résistance.
Moyen-Âge : de 476 apr. J.C. à la découverte de l’Amérique en 1492
À partir du Moyen-Âge, le sexe devient tabou en raison de la religion et du caractère patriarcal de notre société. L’Église impose les interdits de l’Ancien Testament tels que l’inceste, la nudité, la sodomie, les rapports pendant les règles et l’homosexualité. Cette dernière est d’ailleurs condamnée par l’Église, envoyant le coupable au bûcher dans les cas les plus extrêmes.
De plus, le mariage arrangé était la norme sous l’Ancien Régime. Constituer une alliance entre deux seigneuries permettait de renforcer le pouvoir entre deux familles et ainsi de préserver une lignée et de transmettre un patrimoine en agrandissant le territoire. Cela engendrait protection, richesse et descendance. Bien souvent, il n’y avait aucune notion d’amour dans les mariages. Le but des rapports sexuels était la procréation, et non le plaisir. La femme devait bien souvent être passive et laisser toutes les initiatives à l’homme. De plus, la présence de sang menstruel, nécessaire pour enfanter, était tabou et les femmes, de ce fait, souvent mises à l’écart.
La sexualité était donc régie par des règles très strictes, édictées par la religion. Des procès se tenaient par exemple si la femme se plaignait d’un problème d’érection chez l’homme. La cour se réunissait afin d’observer le couple à l’œuvre et de déterminer l’origine du problème. Si celui-ci provenait de la femme, elle était publiquement humiliée. Sinon, c’était la réputation de l’homme qui s’en trouvait menacée. Les aristocrates assistaient également régulièrement à ces procès, pariant même de l’argent.
Époque moderne : de 1492 à la Révolution française de 1789
Durant l’époque moderne, la sexualité était jugée comme une chose sale. Les femmes s’habillaient de vêtements longs et la nudité n’était pas tolérée. Le sexe était tributaire des codes sociaux dérivés d’une éthique chrétienne rigoriste. La devise était simple : tout rapport sexuel pouvait donner naissance à un enfant. L’Église préconisait alors une sorte d’abstinence sexuelle durant les périodes de jeûne comme l’Avent et le Carême. L’homosexualité était toujours réputée contre-nature, et le clergé encourageait le mariage aussi tardivement que possible.
Avec la perte d’influence de l’Église après la Révolution française, de nouvelles lois émergèrent. Le 20 septembre 1792, l’État autorisa le divorce, dont le taux était de 25 % des mariages. Le code pénal ne considéra plus l’homosexualité comme un crime et engloba toutes les pratiques non conformes à la norme sociale dans le cadre d’une atteinte aux bonnes mœurs. La révolution sexuelle fut lancée alors que l’Église perdait peu à peu son rôle tutélaire.
Époque contemporaine : de 1789 à aujourd’hui
Aujourd’hui, la sexualité n’a jamais eu une place aussi importante dans la société. Certes, toutes les cultures ne sont pas encore concernées par ce changement mais il gagne tout de même du terrain. À la fin de la Première guerre mondiale, les femmes troquèrent leurs longues jupes pour des vêtements plus courts. Les codes sociaux tolérèrent de moins en moins la pilosité. Après la Seconde guerre mondiale, l’image d’une femme bien portante s’occupant du foyer fut troquée contre celle d’une femme mince prenant part aux activités économiques au même titre que les hommes.
C’est également durant l’époque contemporaine que, pour la première fois, le but de la famille changea du tout au tout. Philippe Meirieu, spécialiste des sciences de l’éducation et de la pédagogie, écrit même : Nous vivons, pour la première fois, dans une société où l’immense majorité des enfants qui viennent au monde, sont des enfants désirés. Cela entraîne un renversement radical : jadis, la famille « faisait des enfants », aujourd’hui, c’est l’enfant qui fait la famille. Désormais, le mariage se choisit, et les enfants aussi !
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Vers une société plus tolérante
La place des femmes s’ajuste, l’égalité se resserre. On se questionne désormais sur l’origine du plaisir féminin et comment atteindre l’orgasme. Dans l’ouvrage De re anatomica paru en 1559, l’auteur évoque le clitoris en expliquant qu’il est le siège principal du plaisir des femmes pendant les rapports sexuels. Tout évolue, l’accès aux connaissances place le sexe et le plaisir au cœur d’une relation épanouie. Une étude de l’HEYME évoque que 3,1 % des jeunes interrogés se déclarent pansexuels, c’est-à-dire des personnes qui ne tiennent pas compte du genre de l’autre. De plus, 55,2 % visionnent régulièrement des films pornographiques.
De même, le sexe s’explore de plus en plus tôt. En effet, l’étude de Santé Publique France montre que l’âge médian du premier rapport sexuel des Français a baissé d’un an chez les hommes et de presque deux pour les femmes. En 1967, la contraception se légalise puis se commercialise. La Sécurité Sociale rembourse la contraception à partir de 1972. La légalisation de l’avortement intervient trois ans plus tard. Celui-ci est alors remboursé en 1982. Grâce à toutes ces améliorations en termes de santé et de recherche, la population s’intéresse et comprend désormais le sexe beaucoup mieux qu’auparavant.
Alors que dans l’ensemble, la sexualité a souvent été critiquée, jugée sale et tabou ; maintenant, les codes sociaux se brisent peu à peu pour laisser de la place aux minorités. Les mentalités évoluent vers une sexualité plus libre, basée sur le plaisir, le respect et l’égalité.