Bal masqué moderne au défilé Louis Vuitton printemps/été

La Fashion Week de Paris s’est terminée vendredi dernier. Après ces jours modes intenses, il est maintenant l’heure de décrypter les shows les plus marquants. Aujourd’hui, direction le bal masqué du XIXe siècle revisité version 2021 du défilé Louis Vuitton printemps/été.

Le défilé Louis Vuitton printemps/été 2022 aura fait parler. Pour les 200 ans de la marque et son premier défilé physique depuis le début de la pandémie, Nicolas Ghesquière a vu les choses en grand. Il a choisi d’investir le mythique Louvre et notamment le passage Richelieu pour présenter sa nouvelle collection. Le catwalk plongée dans le noir, a apporté cette touche secrète et sensuelle propre à ce genre de soirées d’antan. Les incroyables lustres en cristal, eux, ont ainsi sublimé les looks inspirés des bals masqués du XIXe siècle. Mais le directeur artistique, qui aime surprendre, a dépoussiéré ces tenues à coups de pièces bien ancrées en 2021. Le show immersif marqué par l’intervention d’une militante d’Extinction Rebellion pour dénoncer l’impact de l’industrie de la mode sur l’environnement.

L’irruption d’une militante sur le podium du défilé Louis Vuitton printemps/été

C’était clairement l’un des événements de cette Fashion Week. Au milieu de ce défilé Louis Vuitton printemps/été, une activiste d’Extinction Rebellion a fait irruption sur le catwalk au milieu des mannequins. Elle a ainsi brandi une banderole avec les mots « Overconsumption = extinction » soit « Consommation = extinction ». La militante a ensuite été emmenée hors du Louvre par des agents de sécurité. Deux autres activistes ont aussi tenté de s’infiltrer. Derrière cette action, une trentaine de militants d’Extinction Rebellion mais aussi des Amis de la Terre et de Youth for Climate. L’objectif ?

Dénoncer la surconsommation dans l’industrie textile et son impact sur les bouleversements climatiques. Dans un communiqué, ils ont également interpellé le gouvernement pour leur demander d’imposer « une réduction immédiate des niveaux de production dans le secteur alors que 42 vêtements par habitant ont été commercialisés en France en 2019 ». Interrogés par l’AFP, Louis Vuitton n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet.

Un lieu chargé d’histoire pour la marque

Mesdames, parez-vous de vos plus beaux atouts et devenez quelqu’un d’autre si vous le désirez, ce soir les masques sont là pour vous cacher. C’est clairement l’invitation que semble avoir lancé Nicolas Ghesquière. Son défilé Louis Vuitton printemps/été 2022 est une ode aux bals masqués du XIXe siècle. Un hommage direct à l’histoire de la marque qui fête son bicentenaire cette année. C’est déjà ce fameux passage Richelieu que le fondateur de la maison empruntait pour livrer ses malles à la princesse Eugénie.

A ses débuts, la marque était en effet spécialisée dans l’équipement équestre et les malles de voyages que Vuitton a révolutionné. Il était donc naturel que le défilé anniversaire se réapproprie ces lieux chargés d’histoires. Une histoire qui commence justement au milieu du XIXe siècle quand Louis Vuitton se met à créer des malles pour les plus grands noms de la planète. Une époque qui va devenir le fil rouge de cette nouvelle collection.

Un bal masqué du XIXe siècle…

Une fois le passé de la marque décrypté, le thème du défilé prend ainsi tout son sens. Sans compter que le directeur artistique de la maison est passionné par l’époque victorienne et son style vestimentaire caractéristique. Résultat : des robes aux crinolines incroyables, et le mot est faible. Elles prennent la forme de paniers géants, parfaits pour respecter la distanciation sociale. Les matières sont luxueuses et tissent un conte mystérieux aux teintes noires, blanches, dorées et écru. Côté embellissements, le fameux « less is more » en prend un coup. Ce sont des dentelles, des broderies au savoir-faire exceptionnel et des perles à n’en plus finir. Des techniques datant des années 1920 ont même été utilisées pour concevoir ces pièces d’exception. Les capes aux milliers de plumes balayant le sol complètent ces looks venus d’une noblesse lointaine. 

La frontière entre le prêt-à-porter et la haute couture semble être ici largement franchie. Aux robes rappelant les sublimes lustres en cristal suspendus juste au-dessus, s’ajoutent les fameux masques. Les détails en perles et pierres sont là aussi légions. Les formes tout en arabesques caractéristiques de ces loups du XIXe siècle sont reproduites à la perfection. Mais apparaissent également des masques version 2021, combinaison de lunettes de soleil ultra modernes et lignes victoriennes. Car l’autre passion de Nicolas Ghesquière, c’est bien de fusionner les époques pour créer un style unique.

…twisté version 2021 pour ce défilé Louis Vuitton printemps/été

« Irma Vep ». C’est dans cette série de Olivier Assayas, produite par HBO, que le directeur artistique Femme a puisé son inspiration pour son défilé Louis Vuitton printemps/été. Petit détail au passage, c’est lui qui en a imaginé et réalisé les costumes. Le pitch ? Un vampire, interprété par Alicia Vikander, traverse les époques. S’il adapte sa garde-robe aux tendances du moment, il conserve toujours cet esprit des temps anciens qu’il amène par touches dans ses looks. Se réinventer sans jamais oublier le passé, la vision de Nicolas Ghesquière dans son interprétation la plus parlante.

Les vestes queues de pie ultra chics côtoient ainsi les skaters shorts kaki ou blancs au style effortless. Les robes à crinoline, elles, sont accessoirisées de chaussures à talons futuristes improbables aux lacets néons. Leurs couleurs flashy orange, jaune fluo et bleu électrique contrastent avec les teintes sobres des vêtements. Certaines de ces robes de bal se déchirent et se réinventent pour devenir des robes modernes ou des tops, encore plus modes en version asymétrique. Associés à un jean, ils traversent les siècles pour composer un look bien ancré en 2021. Les parkas noires, elles, apportent une touche streetwear à des chemises bouffantes et des jupes sages. Et le cuir est là pour ajouter une touche rock à l’ensemble. Une histoire nouvelle se crée ainsi chez Vuitton sous la houlette de Nicolas Ghesquière.

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Le pianiste caché

Détail passé presque inaperçu, l’univers de la musique et notamment du piano apporte une subtilité toute particulière à ce défilé Louis Vuitton printemps/été. Les vestes queues de pie sont évidemment les pièces les plus évocatrices. En version crop ou longues, elles sont l’une des pièces phares de la collection. Une veste qui ramène immédiatement à l’image du pianiste d’antan rabattant élégamment ses basques au moment où il s’assoit pour commencer son morceau.

La prédominance de noir et de blanc dans la collection est un clin d’œil là encore au piano et notamment aux touches empreintes de ces teintes caractéristiques. Référence beaucoup plus subtile mais qui fait toute la différence, le jabot. Symbole par excellence de la noblesse de l’époque victorienne notamment, il agrémente de nombreuses chemises de ce show. Et, à y regarder de plus près, certains d’entre eux représentent en fait des touches de piano. Un détail ludique qui casse le côté solennel du jabot. Nicolas Ghesquière, en marionnettiste hors pair, tire ainsi les ficelles des époques et les entremêlent pour créer un style à la fois novateur et chargé d’histoire.

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