Madagascar, ses paysages magnifiques et exotiques, son raphia… et ses entrepreneurs ! Tiana Raharison et ses fils Liva et Narindra sont à l’origine de la marque de chapeaux et de sacs en raphia malgache IBELIV. Ils ont réussi à se sortir de la précarité en créant une entreprise florissante d’accessoires de mode de luxe.
Article rédigé par : ZIEL Jérôme
Employant aujourd’hui plus de mille personnes, Tiana Raharison et ses fils Liva et Narindra nous ont parlé de leur éthique du travail, de leur sens des affaires, et aussi de la philosophie altruiste qui les animait. Conscients du talent et du savoir-faire de leurs collaboratrices-artisanes (des femmes pour la quasi-totalité), ils les soutiennent et les encouragent en investissant dans leur formation et leur bien-être… Portrait d’une famille d’entrepreneurs franco-malgaches pas comme les autres !
L’enfance et la jeunesse de Tiana : s’en sortir en entreprenant
Issue d’une famille nombreuse de 11 enfants dont elle est la seule fille, l’enfance de Tania est marquée par la précarité matérielle. « Nous n’avions pas beaucoup à manger, se rappelle-t-elle. Par exemple, nous nous partagions une seule miche de pain pour le petit-déjeuner. Quant à notre garde-robe, elle se réduisait au strict minimum ». Cette situation a pourtant fait naître en elle une grande combativité et le désir de s’en sortir en montant une affaire.
Alors qu’elle passe son bac, elle exerce en même temps en tant que coiffeuse chez des particuliers. Ou bien alors elle coud des vêtements pour les autres… Avec un certain succès : « quand des personnes voyaient mes vêtements, elles me demandaient qui les avait faits. Lorsque je leur révélais que c’était moi, elles étaient surprises et m’en commandaient ».
Dès la fin des années 1990, elle commence à travailler en dehors de Madagascar, en France notamment. En constatant le succès remporté par les produits malgaches sur les marchés, elle décide avec son fils aîné Liva de se consacrer à l’exportation d’articles artisanaux locaux vers la France. Alors qu’il voyage en Amérique du Sud, son fils Liva est étonné par le succès remporté par l’artisanat équatorien à l’export, grâce à la production de ses fameux chapeaux panamas. Comme il a conscience de la richesse du savoir-faire malgache, il cherche le moyen de mieux valoriser ce potentiel en s’inspirant de ce qu’il a vu en Amérique du Sud.
Naissance de IBELIV
C’est ainsi que IBELIV est née. Tiana s’en rappelle comme si c’était hier. « Nous avons décidé de monter notre entreprise en 2013 avec les moyens du bord. Nous avons transformé notre propre maison en atelier, en nous faisant aider par deux employés seulement au début. Nous faisions tout, de A jusqu’à Z : design, production et commercialisation. Nous travaillions jour et nuit, notamment aux tout débuts de notre affaire ».
Narindra, cadet de la fratrie, poursuit. « J’ai littéralement grandi au milieu des ateliers de l’entreprise. Nous avons commencé par une activité commerciale entre 2009 et 2013, nous contentant d’exporter des produits artisanaux locaux. De fil en aiguille, nous en sommes arrivés à vendre nos propres produits, fabriqués dans nos ateliers, sous notre propre marque ». Avec IBELIV, la famille peut contrôler la qualité des articles qu’elle produit, tout en promouvant ses valeurs et son approche sociale.
Les chapeaux et sacs en raphia de IBELIV : entrée fracassante dans le monde du luxe
Ainsi, au début, la marque comptait surtout se distinguer par le savoir-faire de ses artisans et la qualité de son offre. Aujourd’hui, elle poursuit son projet de branding en mettant en avant la politique sociale qu’elle mène activement à l’égard de tous.tes ses collaboratrices et collaborateurs. Selon Narindra, « aujourd’hui, nous avons 1.200 m² d’ateliers et employons plus de 1.000 personnes ».
IBELIV se spécialise dans la confection de chapeaux et des sacs en raphia, fibre du palmier signature de Madagascar. En soignant le design de ses articles, en leur donnant un twist contemporain, la marque a forcé les portes de l’univers du luxe. « Nous mettons en valeur le savoir-faire artisanal et la créativité de la population malgache », expliquent en chœur Tiana et Narindra.
Narindra poursuit : « On entend souvent dire que les Malgaches ont ‘des mains en or’. En conséquence, tous nos produits sont fabriqués à la main, en utilisant la technique du crochetage qui se transmet sur l’île de mère en fille depuis des générations, particulièrement en milieu rural ». Nombre de grandes entreprises du luxe l’ont bien compris aussi, cherchant à tirer profit de ce savoir-faire local, dans le cas des broderies faites à la main, par exemple. IBELIV, quant à elle, souhaite faire en sorte que l’artisanat local profite davantage aux Malgaches, en les faisant sortir du simple rôle de sous-traitants des grandes marques internationales.
L’ensemble des articles de IBELIV est à base de raphia malgache, espèce de palmier répandue sur l’île et dont il est l’emblème. De ses longues feuilles (les plus longues du règne végétal) sont extraites les fibres de raphia. Comme le précise Narindra, « le raphia, que nous travaillons selon la technique du crochetage, est un peu l’équivalent de la laine telle qu’elle est tricotée en Europe. Ce savoir-faire était à l’état dormant entre les mains des femmes malgaches. Nous avons simplement voulu le réveiller, en lui donnant un style contemporain. Nos articles de luxe sont donc utiles, à plus d’un titre. D’une part, ils permettent de se protéger du soleil (chapeaux) ou de transporter ses affaires (sacs) avec style et élégance. D’autre part, ils contribuent, à leur échelle, au développement local de Madagascar et au rayonnement de son savoir-faire ».
Soutenir et donner confiance aux collaboratrices pour les aider à réaliser leurs rêves !
Les membres de la famille fondatrice de IBELIV souhaitent contribuer à la prospérité de la population malgache, les femmes notamment. Tiana était la seule fille d’une fratrie de 11 enfants. Or, les filles ne sont traditionnellement pas mises en avant au sein de la société patriarcale malgache. Selon Narindra, « nous souhaitons que l’histoire de notre mère puisse servir d’exemple et de guide aux femmes artisans qui travaillent dans nos ateliers. Nous avons bien été capables de nous en sortir : pourquoi pas les autres ? »
C’est la raison pour laquelle IBELIV insiste sur l’éducation, en traitant ses artisanes non pas comme de simples employées, mais comme des collaboratrices à part entière. « Les personnes sont généralement heureuses de travailler chez nous : le turn-over demeure très faible, et nous avons parmi nos collaboratrices des artisanes qui nous ont accompagné depuis le début ».
Redonner aux femmes de Madagascar la place qu’elles méritent
Ainsi, nombre des initiatives sociales que mène IBELIV concerne le milieu rural, en référence aux propres origines de la famille fondatrice. À la campagne, les perspectives professionnelles pour les femmes sont très limitées. Les hommes s’occupent des travaux des champs tandis que les femmes restent au foyer. Comme Tiana l’explique, « nous nous sommes donc concentrés sur les opportunités que nous pouvions offrir aux femmes. Par exemple, dans les villages dans lesquels nous sommes implantés, nous avons mis en place des ateliers de formation, largement ouverts à tous types de publics, y compris les handicapés. En effet, nous estimons qu’à partir du moment où ces personnes manifestent la volonté de s’en sortir, nous les accueillons à bras ouverts. Nous leur offrons donc des formations gratuites. Au bout d’un certain laps de temps, nos stagiaires sont admises à intégrer l’entreprise ».
Dans un village situé en périphérie de Tananarive, les femmes sont ainsi devenues le principal moteur de l’économie locale. Autant les hommes continuent de travailler aux champs, autant les femmes ont fini par devenir les principales pourvoyeuses de leur foyer grâce à leur production artisanale. Et cela représente un changement considérable à Madagascar. Selon Narindra, « nous encourageons l’élévation de la position sociale des femmes en valorisant leur contribution économique. Plusieurs villages dans lesquels nous sommes implantés se sont ainsi transformés grâce aux centaines de personnes avec lesquelles nous collaborons. Certaines ont monté des épiceries, d’autres vendent le surplus agricole obtenu par suite de l’amélioration de leurs techniques de culture, etc. ».
Un désir de réussite contagieux
Tiana, Liva et Narindra ne comptent d’ailleurs pas s’arrêter en si bon chemin. Ils vont sous peu mettre en place un centre de santé gynécologique en partenariat avec l’ONU… et aussi une garderie axée sur les disciplines d’éveil, sportives et culturelles à destination des jeunes enfants de leurs collaboratrices. Ces derniers pourront même s’initier au tennis !
Aujourd’hui, Tiana et sa famille sont à l’abri du besoin, notamment en raison de leur envie de réussite. En outre, ils essaient de partager les fruits de leur succès avec l’ensemble de leurs collaboratrices et collaborateurs. « Nous souhaitons favoriser la réussite de tout le monde, des femmes en particulier. C’est cela qui est à la base de notre vision ! », conclut Tiana.
Plus d’information sur : https://www.ibeliv.fr/pages/nos-valeurs
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