Le titre est un peu provocateur (on l’avoue). Mais, on pose une question de fond : La fête qui révèle le sexe (oui le sexe!) d’un bébé n’est-elle pas un peu ringarde ? Ce type de fête est-il encore représentatif de notre société, en termes de genres ?
Alors que le concept débarque progressivement en France, Ô Magazine vous explique pourquoi cette fête, tout droit venue des Etats-Unis (comme d’habitude), est problématique à bien des égards.
Qu’est-ce qu’une gender reveal party ?
“La fête de révélation du sexe” en français (c’est déjà moins sexy) est une fête prénatale organisée par les futurs parents. Ces derniers y découvrent, en compagnie de leurs proches, le sexe de leur futur bébé. Cela se déroule généralement à terme de grossesse. Les familles se réunissent alors dans un jardin ou en propriété familiale, décorés pour l’occasion. Le lieu est donc orné de petits ballons, d’assiettes en plastique en rose ou bleu où sont inscrit “est-ce un garçon ou une fille ?”.
On retrouve également des serviettes floquées, des guirlandes et des points d’interrogation partout puisqu’il s’agit du thème de cette célébration. On se gave de cupcakes, de macarons et autres pâtisseries. Mais également de mini-sandwichs, de mini-quiches et autres assortiments salés. Bref, tout est esthétiquement beau et accordé entre la décoration, le buffet et les tenues (surprenant !). Effectivement, certains parents imposent des dress code pour l’occasion.
A ne surtout pas confondre avec la baby shower qui est une autre fête prénatale. La future mère est la reine de la journée. On lui offre des cadeaux pour qu’elle puisse accueillir dignement son enfant.
La fameuse révélation du sexe du bébé
C’est le moment le plus important de la fête. Ainsi, tous les invités se réunissent pour découvrir le sexe du bébé. Il peut s’agir d’un ballon rempli de confettis dont la couleur déterminera le sexe du bébé. Même principe pour des fumigènes et des pinatas en forme de point d’interrogation. S’il y a bien un domaine où les Américains excellent, c’est bien l’extravagance. En effet, les individus font preuve d’une inventivité impressionnante pour simplement découvrir le sexe de leur petit-bout. Un tour en hélicoptère, un power ranger rose ou bleu, se jeter de la peinture ou encore privatiser des monuments nationaux pour qu’ils s’illuminent en bleu ou rose.
Il s’agit donc d’une célébration qui se veut chargée en émotions, car tous les membres de la famille sont présents pour vivre le moment… ou pour l’instagrammer. Chacun ses propriétés ! Les parents sont censés être heureux peu importe le résultat et pleurer de bonheur à chaud de larmes. On dit bien “censé” parce que ce n’est pas toujours le cas (notamment quand les futurs pères apprennent que c’est une fille). Bref, on peut considérer ça comme un véritable moment familial rempli d’amour, d’affection et de bonheur. Ou on peut y voir une démonstration ostentatoire, du “m’as-tu vu” poussé à son paroxysme. A vous de choisir votre camp !
Le “bon” et le “mauvais” sexe révélé
A cette fête, il arrive que certains parents ne cachent pas leur déception quant à la révélation du sexe du bébé. Bizarrement, cela se produit généralement quand le couple attend une fille. Ça en dit long sur le sexisme et la misogynie qui sont véhiculés dans la société. En réagissant ainsi, on pérennise la misogynie c’est-à-dire la détestation du genre féminin. Ainsi, sont légitimés les discours tels qu’il y aurait plus de contraintes à élever une fille qu’un garçon. Que ce serait “moins drôle”, “moins intéressant” et “plus fatiguant”. Cette pensée remonte à très loin. Dès l’Antiquité grecque, on préférait accueillir les garçons plutôt que les filles car c’était plus rentable.
On remet également sur la table le préjugé des “femmes hystériques”, qu’elles seraient submergées par leurs émotions donc plus “embêtantes”. Donc, c’est une bien triste vision des femmes, qui même avant leur naissance apparaissent comme un problème pour leurs parents. Cela véhicule l’image des femmes comme d’un “mauvais” sexe. Cette fête met alors en avant des comportements misogynes regrettables dans un moment où les individus sont censés se réjouir de l’arrivée d’un enfant.
Une fête qui a peu de sens aujourd’hui
Aussi, cette fête révèle une pratique normée du genre. Aujourd’hui, la recherche universitaire et plusieurs collectifs et associations ont réussi à établir que le sexe biologique et le genre sont deux éléments complètement différents. Le genre a une fonction sociale. Il existe donc un spectre avec une multitude de genres. Et c’est aux individus de se définir ou pas d’ailleurs.
Donc, ce type de fête comme la gender reveal party apparaît comme désuète pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il révèle uniquement le sexe biologique de l’enfant et sacralise la binarité des genres. Apprendre que son futur enfant a soit un pénis ou un vagin ne détermine en rien son identité de genre (non-binaire, transgenre, cis-genre etc.). De plus, qu’en est-il des personnes dont les appareils génitaux ne correspondent pas aux définitions du masculin ou du féminin ? Par exemple, les enfants intersexes.
Ensuite, on reprend la tradition sexiste du bleu et du rose. Le bleu, étant associé au masculin et du rose associé au féminin. Pourtant, cela n’a pas toujours été le cas. En effet, au Moyen-Âge, la couleur bleue était attribuée aux filles et inversement le rose aux hommes. Selon France Info, la couleur rose à cette époque inspirait la virilité. Quant au bleu, il faisait référence à la Vierge-Marie. Ainsi, la perception du masculin et au féminin ne sont pas des entités figées dans le temps. Cela change régulièrement.
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Conclusion
En conclusion, le propos n’est pas de savoir s’il faut cancel la gender reveal party. Chacun.e fait ce qu’iel a envie de faire. L’objectif est de se questionner sur le sens de cette fête dans la société dans laquelle on vit. Elle continue ainsi de perpétuer des traditions sexistes et des comportements misogynes. Bien qu’elle soit riche en émotions et en bonheur parental, la gender reveal party apparaît obsolète face au spectre du genre pour l’enfant. Cela ne révèle quasiment rien sur le devenir des enfants.