La start-up “Les Bornées” est née en 2017 alors que Maude Baudier a souhaité réagir à l’omniprésence des hommes, entrainant parfois des remarques sexistes, dans le milieu du cyclisme. Au fil de ces quatre années, le projet s’est développé en France et en Suisse, pays dans lesquels la jeune entreprise organise des rides, lieux d’entraînements et de rencontres entre cyclistes pour tous les niveaux.
“Aurait-elle un vélo électrique ? ” s’est esclaffé un charmant camarade de course voyant Maude Baudier le dépasser lors de l’étape du Tour en juillet 2018, compétition permettant de faire vivre une étape de la Grande Boucle à ses participants. ” Ces réflexions sous le couvert de plaisanterie ont montré une part de sexisme présent dans le cyclisme en l’occurence” a expliqué la jeune femme. “Quelques hommes pensent comme ça, c’est pas une généralité évidemment” a-t-elle insisté.
Maude l’avait expérimenté dès novembre, au moment de l’annonce, sur les réseaux sociaux, de sa participation à la compétition. “Le problème était visiblement mon genre. Puisque certains hommes n’arrivaient pas à finir l’étape, il allait de soi pour certains qu’une femme n’y arriverait pas non plus” a raconté Maude. Raté ! Non seulement la sportive l’a fait, mais en plus, un projet a fleuri ; Les Bornées.
Pour ne plus que sexisme rime avec cyclisme
Certes l’accueil laisse parfois à désirer mais pour arriver à cette étape, encore faudrait-il que les femmes s’intéressent à cette pratique sportive. “Je me suis demandée ce qu’il se passait dans ce secteur pour que certains hommes pensent comme ça. J’ai forcément remarqué qu’il n’y avait pas beaucoup de femmes”. En témoigne le nombre de participantes à l’étape du Tour. “Nous étions 6% de femmes soit 500 participantes environ” nous a informé Maude.“Le manque de représentativité et également le manque de capacité à prouver que la femme est capable a entraîné ce type de remarques” pense la fondatrice des Bornées.
Le but de la start-up Les Bornées, n’est pas de forcer qui que ce soit mais de “promettre un environnement de pratique et d’échange” à toute personne souhaitant rouler en France ou en Suisse. Les courses sont évidemment mixtes. Les hommes sont donc au rendez-vous ! Naturellement davantage présents dans le cyclisme, ils ont même aidé Maude à fonder son projet.
“Les hommes se sont intéressés dès le début au projet. Ça a été très spontané. Ils trouvaient ça cool comme projet et voulaient aider” a expliqué Maude. “Nous leur avons fait savoir qu’on ferait une préparation physique tout en leur proposant d’y participer et de donner leurs conseils.” a t-elle ajouté. Depuis le nombre de groupes a grandi, ils sont désormais établis par niveaux. Du moins, pour les rides classiques. L’entreprise propose aussi de temps en temps des rides en présence d’athlètes.
Créer des lieux de rencontre malgré la distanciation sociale
“Nous avons fait des rides avec des athlètes dans le but de créer des rencontres, nous voulions en faire beaucoup en 2020 mais le covid nous a obligés à revoir nos plans” a expliqué la fondatrice de la start-up. “Nous nous sommes rabattus sur le virtuel en faisant des sessions en lives pour poser à des questions à des athlètes sur Instagram” a t-elle poursuit, se rappelant des beaux jours en extérieur, sur l’étape du tour en 2019. “C’était le premier et gros évènement où l’on parlait de nous. On a emmené 32 athlètes pour lesquels nous avons tout organisé”. “La vidéo me donne toujours autant de frissons” a expliqué Maude, marquée par les émotions ressenties à cette occasion.
L’objectif c’est aussi de pouvoir créer un pont entre l’univers pro et l’univers amateur “c’est dans notre volonté d’accélérer ces choses là et de faire venir des athlètes”. Lorsqu’un athlète est convié, le groupe accueille tout type de niveau “le but c’est qu’une personne qui a commencé le vélo il y a six mois puisse y participer” a expliqué la jeune femme.
Cette dernière année, marquée par le covid, a mis en lumière certains blocages entraînés par le virus.“La distanciation sociale a impacté sur le fait d’aller partager un moment en groupe avec quelqu’un que tu ne connais pas”. En plus de cela, pendant “très longtemps” les groupes étaient limités à six personnes, ce qui a limité les échanges. Certains ont par ailleurs développé une peur de se retrouver avec des inconnus. Mais, les ambitions de la start-up n’ont pas faiblies pour autant.
Une start-up aux grandes ambitions
Pour le moment, Les Bornées est le sponsor de deux athlètes en triathlon. Dans l’univers du cyclisme “tu fais partie d’une équipe et nous n’avons pas les moyens de sponsoriser autant d’athlètes à la fois”. Pas encore, mais Maude “aimerait bien un jour”. D’ailleurs l’entreprise est en pleine levée de fonds. Levée de fonds que la cheffe souhaite clôturer en décembre.
Les revenus permettraient alors à la fondatrice de l’entreprise de se rémunérer. “Je paye mon équipe, j’ai des salariés mais je suis la seule a pas être rémunérée” a t-elle expliqué. Actuellement il y a trois salariés dans l’entreprise. En septembre, ils seront six. “La levée de fond nous permettrait aussi de recruter du monde, qui aidera au développement du projet”.
Une fois les moyens humains et matériaux mis à disposition, Maude souhaiterait que la start-up Les Bornées devienne une référence lorsqu’une personne souhaite se lancer dans la course à vélo mais qu’elle n’ose pas.“Dans le meilleur des mondes, j’aimerais que Les Bornées soit la plateforme pour que plus jamais une personne n’ait à rouler seule.” nous a t-elle expliqué.
Une plateforme digitale est d’ailleurs en cours de création afin de faciliter la recherche de rides adaptés à chacun. “Mon objectif serait de se dire que toute femme ou homme puisse se lancer malgré la peur de rouler seul lorsqu’on ne connait pas les parcours, ou lorsqu’on a peur de crever” a ajouté la sportive. La start-up a en effet aussi mis l’accent sur les formations mécaniques, utiles dans ce type de pratique sportive.
“J’aimerais bien que tout cela soit mis en place pour 2023/2024” a poursuivi la jeune femme. Avec l’arrivée des Jeux Olympiques à Paris Maude espère qu’une dynamique positive autour du cyclisme se mettra en place.” Ça sera l’occasion de leur faire découvrir le vélo” s’est-elle réjoui. Maude a aussi des ambitions sportives propres à elle. “A titre personnel, j’aimerais refaire un Iron Man”, exploit sportif dont elle est le plus fier. Pour le moment, la femme de 30 ans se concentre sur le développement de sa start-up Les Bornées, partout en Europe.