Le tartan, étoffe quadrillée bien connue pour parer les kilts en Écosse, conquiert depuis plusieurs années d’autres frontières. De l’unité clanique écossaise au mouvement Punk, il séduit par sa singularité. Alors, comment le tartan a-t-il franchi la Manche pour enchanter nos armoires ?
Les origines du tartan
Le tartan est une étoffe de laine à motifs linéaires entrecroisées, formant de multiples carreaux. On attribue un nom à cet enchevêtrement singulier : le Sett. Qualifiant tout d’abord la technique de tissage particulière, le mot évoque désormais ce motif quadrillé identifiable. Si on l’associe traditionnellement à l’Écosse, sa plus ancienne trace à ce jour se révèle être en Chine. En effet, un motif similaire au tartan a été découvert dans des sépultures Tokhariennes datant de plus de 3500 ans avant notre ère. Cette découverte a valu à ce peuple indo-européen d’être qualifié de « Celtes de Chine ». En Écosse, la découverte d’un tissu tartan recouvrant un pot en terre permet d’estimer l’utilisation quotidienne du motif au IIIème siècle.
La tartan comme système de reconnaissance
À l’instar de son histoire, il représente aujourd’hui le motif principal du kilt écossais. En Écosse, le tartan a tour à tour pu définir un rang social, une appartenance à un corps d’armée, une famille, un clan ou un district. Comme en témoignent Frank Adam et Tomas Innes dans The Clans, Septs, And Regiments Of The Scottish Highlands, le nombre de couleurs du motif pouvait définir le rang dans la société celte.
« The original use of these chequered garments was not, as now, to show the tribe or clan to which their warer belonged, but was a distinctive emblem of the rank or position which he held. There was but one colour in the clothes of servants ; two in the clothes of rent-paying farmers ; three in the clothes of officiers ; five in the clothes of chieftains ; six in the garments of Druids or poets ; while the King, Ard-righ, or Chief had right to seven colours. »
Frank Adam et Tomas Innes – The Clans, Septs, And Regiments Of The Scottish Highlands (1934)
Une couleur unique était attribuée aux servants, deux couleurs pour les cultivateurs, trois pour les officiers. Ou encore cinq pour les chefs, six pour les poètes et druides et sept couleurs pour le roi ou Grand Chef. Plus l’habit comportait de couleurs, plus son propriétaire occupait un rang social élevé. Le choix des couleurs, en revanche, reflétait le clan et son origine.
L’attribution d’un tartan unique à un clan est toujours d’actualité. Les différentes familles écossaises continuent d’hériter d’un emblème familial qu’ils se transmettent de générations en générations.
Son abolition entre 1747 et 1782
Au XVIIIème siècle, le tartan est aboli à la suite des combats menés par les Jacobites, qui se sont soldés par une défaite. « L’Act of Proscription » est établi par le gouvernement britannique. Il évoque l’interdiction du « motif écossais » et fait loi entre 1747 et 1782. Le Parlement cherche à abolir le système de clans et unifier les Highlands au sein de son territoire. Les peines encourues pour le port de ce « vêtement des Hautes Terres », sont d’une extrême sévérité. La peur d’une nouvelle rébellion écossaise, symbolisée par le tartan, est la cause de cette interdiction. Mais le tartan, cher aux cœurs écossais, reviendra sur le devant de la scène au début du XIXème siècle, réhabilité par Georges IV lors d’un voyage en terres d’Écosse en 1822.
Le tartan sous toutes les coutures
Lorsque l’on songe au tartan, il est courant d’imaginer un enchevêtrement de vert, bleu et rouge. Ce sont les couleurs du tartan dit “classique”. Pour autant, le motif et les couleurs du fameux tissu écossais semblent pouvoir se décliner à l’infini. Les stylistes, couturiers et designers l’ont bien compris. De nombreux nouveaux motifs voient le jour et apparaissent progressivement dans le quotidien sans référer à une symbolique préexistante. Le site « The Scottish Register of Tartans » tient un registre consultable de tous les motifs existants. Il est même possible de proposer sa propre configuration.
Tartan un jour, tartan toujours
Au cours du XXème siècle, plusieurs mouvements sociaux choisissent le tartan comme emblème contestataire. Le mouvement Punk dans les années 1970, en rupture avec un carcan socio-économique contemporain en fait un symbole de résistance. Vivienne Westwood, icône de la mode Punk, l’utilise massivement dans ses collections. Les adeptes du mouvement Grunge, dans les années 90, le réinvestissent à leur tour. Le tartan est également représentatif de la maison Burberry, qui a su faire de son célèbre modèle de tartan beige, rouge et marron sa marque de fabrique.
Le tartan adopte toutes les déclinaisons. Les couleurs fluorescentes et motifs originaux investissent la scène. La traditionnelle chemise à carreaux, souvent motif tartan, fait de nombreux adeptes. Et la décoration l’épouse aussi ! Plaids, coussins, sièges, abat-jours ou tapisseries aux motifs tartan donneront à votre intérieur une touche rustique, chic et chaleureuse. Le tartan s’intègre partout. Et vous, comment l’adopterez-vous ?
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