Près de cent ans après l’instauration du suffrage universel masculin, les femmes obtiennent le droit de vote. Longtemps évincées des droits civiques, les femmes ont durement bataillé pour obtenir le droit de devenir citoyennes. Retour sur cette lutte ardue qui fête son soixante-seizième anniversaire cette année.
Une lutte acharnée
« Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions de l’homme. » Voici ce que l’ordonnance du 21 avril 1944 signée par le général de Gaulle autorise aux femmes. Ces dernières obtiennent l’égalité avec les hommes. Mais le combat ne fut pas de tout repos.
Tout commence au lendemain de la Première Guerre mondiale. Les femmes ont durement travaillé pour remplacer les hommes partis au front. C’est tout naturellement qu’elles réclament le droit de vote. Ainsi, en 1919, un projet est déposé pour accorder ce droit. Première désillusion, les sénateurs le rejettent, malgré l’accord de la Chambre des députés. L’opération se répétera en 1925, 1932 et 1935. Sans succès.
Puis dans les années 1930, comme les suffragettes anglo-saxonnes, les Françaises revendiquent l’accès à la citoyenneté. La journaliste Louise Weiss, à la tête du mouvement, multiplient les actions féministes. En 1935, elles entraînent des suffragettes à l’hippodrome de Longchamp pour « conquérir un nouveau statut civil et politique ».
En 1936, aucun droit de vote n’est encore accordé aux femmes. Cependant, deux femmes entrent au gouvernement de Léon Blum. Irène Joliot-Curie est nommée sous-secrétaire d’État à la recherche scientifique et Cécile Brunschvicg à l’Éducation nationale.
« C’était un paradoxe extraordinaire de penser qu’elles étaient bonnes pour faire des ministres, et pas pour être des citoyennes à part entière ».
Yvonne Dornès, femme de lettres et féministe.
Le droit de vote accordé
C’est tardivement que la France accorde le droit de vote aux femmes. Les pays scandinaves par exemple l’ont reconnu au cours du XIXème siècle. Les Allemandes obtiennent le droit de voter en 1918. C’est finalement le 21 avril 1944 à la suite de la décision prise par l’Assemblée consultative d’Alger que les femmes sont autorisées à voter. Mais le combat ne s’arrête pas là.
En cette date du 21 avril, la France est toujours occupée. La France dite « libre » s’est installée à Alger pour préparer le pays à sa Libération. La question des femmes fut également abordée et a fait l’objet de controverses. La mise en œuvre du droit de vote pour les femmes n’a pas fait l’unanimité. Plusieurs députés masculins s’opposent à ce que les femmes votent lors des premières élections provisoires. Pour eux, le corps électoral serait déséquilibré par une surreprésentation des femmes. D’une part, beaucoup d’hommes se sont engagés au combat. D’autre part, le nombre de prisonniers en Allemagne est très important. Finalement, le député communiste Fernand Grenier met un terme à ce débat :
« L’éloignement de leur foyer de nombreux prisonniers et déportés qui ont été remplacés dans leurs tâches par leurs femmes confère à ces dernières un droit encore plus fort de voter dès les premières élections ».
Fernand Grenier
L’amendement favorable au vote des femmes fut adopté le 24 mars 1944 par une assemblée d’hommes, par 51 voix contre 16.
Le premier vote
C’est dans une France libérée mais toujours en guerre, que les Françaises votent pour la première fois. Elles votent lors des élections municipales du 29 avril 1945. La journaliste et femme politique Gilberte Brossolette se souvient de ce jour : « J’ai pensé que, enfin, nous avions le droit de donner notre avis. Enfin, nous étions des êtres humains à part entière. » Ce jour-là, 12 millions d’électrices étaient attendues aux urnes.
De célèbres femmes de l’époque comme la scientifique Irène Joliot-Curie, mais aussi l’épouse du général Yvonne de Gaulle, ont glissé leur bulletin dans l’urne. Puis en octobre 1945, les femmes votent pour leurs premières législatives. Sur 586 députés, 33 sont entrées à l’Assemblée nationale.
Malgré l’ordonnance du 21 avril 1944, peu de femmes sont élues. Le Parlement compte moins de 10% de femmes et 22% des membres de conseils municipaux sont des femmes. Pourtant, les femmes méritent autant leur place que les hommes, parce qu’elles ne cessent de se battre pour leurs droits.
En pleine pandémie de coronavirus, les femmes semblent toutefois se démarquer. Il semblerait qu’un État dirigé par des leaders féminins est un avantage en situation de crise. Un constat qui intrigue les médias. Une chose est sûre : elles s’illustrent grâce à une politique transparente et efficace.