Cet été, Grossophobie, premier ouvrage français sur le sujet de l’auteure Solenne Carof, a été publié dans la collection interventions. Disponible en ligne et en librairie, cet ouvrage retrace l’histoire de la grossophobie, cette discrimination invisible fondée sur le poids. Entre une approche sociologique et historique, cette étude sur la grossophobie donne toutes les armes face à ce fléau. Ô Magazine a interviewé Solenne Carof, la chercheuse derrière cet ouvrage.
Un ouvrage tiré d’une thèse de sociologie
« Ce livre est tiré d’une thèse de sociologie que j’ai réalisée il y a quelques années et qui portait sur ce que signifie être trop gros ou grosse en France, Allemagne et Angleterre », explique l’auteure. Cet ouvrage, centré sur la France, fait un bilan des études de sciences sociales sur la grossophobie depuis une trentaine d’années.
Plusieurs parties composent l’ouvrage formant une sorte d’historique de la grossophobie. Des origines jusqu’au militantisme, cette étude offre toutes les informations nécessaires pour appréhender cette discrimination.
« L’objectif du livre est de vulgariser ce sujet, d’être lisible par le plus de monde possible », déclare la chercheuse.
La société face à la grossophobie
« Notre société ne prend pas encore assez en compte la question de la grossophobie », explique Solenne Carof. Elle ajoute : « Le critère du poids n’existe pas juridiquement pour porter plainte pour discrimination même si on peut le faire pour des discriminations liées à l’apparence physique, au handicap ou à la santé. »
Toutefois, il y a eu du progrès, comme le constate l’auteure. « Il y a une évolution depuis quelques années, parce que ces dénonciations ont pris plus d’ampleur grâce aux réseaux sociaux », ajoute-t-elle.
L’impact des réseaux sociaux
L’émergence des réseaux sociaux a permis aux victimes de grossophobie de partager leurs témoignages et leurs revendications. « Ce sont les réseaux sociaux et Internet qui ont permis de mettre en lien – de manière internationale – les personnes concernées qui témoignent de leur vécu quotidien et de visibiliser la violence de ce qu’elles vivent, mais également de mettre en lien les associations et militantes pour lutter contre cette grossophobie », décrit Solenne Carof.
Le monde de la culture et des médias s’est aussi ouvert à ce progrès. « Cette prise de conscience a ensuite été amplifiée par des ouvrages et des reportages plus nombreux dans les médias », ajoute la chercheuse.
De nombreux facteurs ont permis de mettre la grossophobie sous la lumière. L’auteure identifie plusieurs facteurs comme « l’influence de certaines personnalités grosses et le développement du mannequinat grande taille ». Elle ajoute : « Cela a permis de visibiliser le manque criant de personnes grosses dans les médias et le monde de la mode. »
Une discrimination différente selon le genre
La grossophobie a pour fondement « un rejet moral de la grosseur et d’une association faite entre corporalité et personnalité », explique l’auteure.
Si cette discrimination a le même fondement pour les hommes et pour les femmes, ses conséquences sont différentes. C’est ce que décrit l’auteure : « Chez les femmes, c’est que cette grossophobie amplifie les injonctions sexistes que subissent toutes les femmes à prendre soin de leur apparence physique. » Elle explique ensuite que les femmes sont plus souvent victimes de grossophobie. En effet, les femmes sont stigmatisées même lorsqu’elles sont en léger surpoids. Tandis que les hommes sont victimes de grossophobie lorsqu’ils sont en fort surpoids.
Une multitude de conseils pour le quotidien
Dans cet ouvrage disponible en ligne et en librairie, Solenne Carof propose des solutions pour s’armer face à la grossophobie. L’auteure entend par ce biais venir en aide aux personnes pour les aider à mieux vivre, si elles le veulent.
Cependant, pour cela, il faut que la société fasse encore des progrès. L’auteure identifie quelques solutions qui pourraient permettre à la société de mieux appréhender la grossophobie. Par exemple : « Proposer une alimentation de qualité peu chère, des soins de qualité non discriminatoires et améliorer les connaissances biologiques et médicales pour comprendre les prises de poids. »
Elle pointe aussi du doigt d’autres initiatives qui pourraient aussi aider la société à changer d’état d’esprit. Elle vise des projets comme « proposer des espaces sécurisés et gratuits pour permettre aux enfants et adultes de faire des activités physiques avec plaisir ».
Les meilleures armes offertes aux victimes de grossophobie sont de saisir la justice. Porter plainte et se faire aider par des associations, c’est la meilleure solution. En effet, discriminer ou insulter une personne selon son apparence physique est interdit.
Le mot de la fin revient à l’auteure, Solenne Carof. Elle explique au cours de l’interview que « tout le monde peut aider pour lutter contre les violences grossophobes ». L’éducation et l’information sont les clés pour comprendre ce phénomène. Elle conclut sur ces mots très justes : « L’homophobie, le racisme et le sexisme sont punis par la loi ; la grossophobie devrait être combattue avec la même vivacité. »