Dans les années 70-80, le topless faisait fureur. Quelques décennies plus tard, les seins nus se font rares sur la plage. Que s’est-il donc passé ?
Article rédigé par Amélia Porret
Certains pensent que la pratique est illégale, d’autres que l’exposition au soleil favorise le cancer du sein. Des croyances qui vont de pair avec la peur de se faire harceler. 46% des femmes rejettent le “topless” par peur qu’une photo soit diffusée sur les réseaux sociaux. L’étude Ifop, publiée en août 2021, fait un constat édifiant : 19% des Françaises de moins de 50 ans assument le monokini contre 34% en 2009.
À cela s’ajoute la crainte de remarques sexistes et surtout chez les jeunes femmes. 50% des moins de 25 ans ont peur de se faire agresser verbalement ou physiquement en montrant leurs seins nus. Mais cette réticence à afficher sa poitrine dénudée au même titre que les hommes, traduit aussi une insécurité sur son image corporelle. 30% des femmes de moins de 25 ans appréhendent les jugements et évoquent la conformité esthétique.
Sur le même thème : Faut-il encore lutter contre le patriarcat en France ?
Les seins dans l’espace public
En théorie, rien n’interdit de bronzer pépère seins nus sur la plage. L’article 222-32 du code pénal condamne “l’exhibition sexuelle imposée à la vue d’autrui dans un lieu accessible aux regards du public” à un an de prison et 15 000 euros d’amende. Mais le “topless” ne constitue pas un délit, compte tenu de l’évolution des mœurs.
En pratique, ça se complique. Les municipalités peuvent interdire le monokini par arrêté municipal. Seulement les villes qui ont pris cette décision doivent afficher un panneau à l’entrée de la plage. Pourtant, souvenez-vous, en août 2020 deux gendarmes ont débarqué sur la plage de Sainte-Marie-la-Mer pour demander aux vacancières dénudées de remettre leur haut de maillot. Aucune interdiction municipale ne l’exigeait. Alertés par une famille dont les deux enfants auraient été choqués à la vue de mamelons, les deux confrères, “guidés par un souci d’apaisement”, évoquent “une maladresse” de la part de ces dames.
Si effectivement la norme évolue, à l’instar de la ville de Grenoble qui autorise désormais le monokini dans ses piscines, une femme sur deux confie avoir déjà été victime d’au moins une forme d’atteinte sexuelle sur une plage. “Dans l’imaginaire collectif, la plage représente le symbole d’une trêve estivale et serait un îlot de paix, cette étude révèle que ce n’est pas le cas puisque s’y reflètent en réalité les tensions sexistes qui émaillent notre société”, développe dans une interview pour Le Parisien, Louise Jussian, chargée d’études à l’Ifop.
A lire également : Journée internationale des droits des femmes
Bronzer seins nus, c’est dangereux ?
Outre la gêne éprouvée face aux regards, subsiste une certitude erronée. Non, bronzer seins nus ne favorise pas le cancer du sein et n’est pas plus dangereux que le bronzage en général. Une étude américaine prouve même le contraire.
Publiée en décembre dernier, les résultats des recherches démontrent la corrélation entre l’exposition importante au soleil et la diminution des risques du cancer du sein. “Une étape de la production interne de la vitamine D se produit lorsque la peau est exposée au soleil. L’exposition au soleil affecte également l’organisme de plusieurs autres façons, avec des effets sur l’inflammation, l’obésité et les rythmes circadiens”, a informé Jo L. Freudenheim dans un communiqué. Avec l’équipe de scientifiques de l’université de Porto Rico et de l’université d’État de New York, elle a comparé la pigmentation de la peau de 307 patientes atteintes du cancer du sein avec celle de 328 personnes ne souffrant pas de cette maladie.
Bien-sûr, les rayons du soleil restent nocifs pour la peau. Des précautions restent donc à prendre pour se prémunir de cancers cutanés. Mais “bien que les recommandations récentes indiquaient de limiter l’exposition au soleil pour prévenir le cancer de la peau, il peut également y avoir un avantage à une certaine exposition au soleil”, a expliqué la chercheuse de l’université d’État de New York.