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Les vertus insoupçonnées de 9 fleurs méconnues en Provence

Fleurs de mauve sauvage

Le climat méditerranéen ensoleillé de la région PACA a toujours été favorable à la culture florale. De nombreuses plantations sont présentes dans la région de Grasse, la capitale mondiale du parfum. Et cette incroyable biodiversité vaut à la région d’être la première productrice de plantes à parfum, aromatiques et médicinales : on compte actuellement plus de 2 000 exploitations sur près de 23 000 hectares. La culture de PPAM constitue ainsi la première ressource économique et touristique du département de Haute-Provence.

Parmi ces plantes cultivées, certaines sont très populaires dans le domaine de la parfumerie ou des cosmétiques, quand d’autres sont remplies de vertus et sont pourtant méconnues. Ces fleurs plus rares utilisées dans les plus grandes compositions parfumantes, mais aussi dans les cosmétiques haut de gamme, méritent l’attention.

La tubéreuse

La tubéreusepolianthes tuberosa –, aussi appelée « Jacinthe des Indes », a été introduite dans le bassin grassois à l’époque de Catherine de Médicis. Originaire du Mexique et importée en Europe au XVIe siècle, son parfum est connu pour être presque narcotique. La tubéreuse a la particularité de s’ouvrir au coucher du soleil pour diffuser son parfum : son nom en hindi signifie d’ailleurs « parfum de nuit ». Initialement, elle était utilisée à Grasse pour masquer les odeurs de cuir des tanneries.

Elle fait depuis une dizaine d’années partie des trois fleurs les plus cultivées à Grasse avec la rose et le jasmin, bien qu’elle soit moins populaire. On la retrouve aussi dans les champs de Pégomas, où elle est cultivée par la famille Mul, en partenariat avec Chanel. En effet, la maison ayant décidé de relancer la production de tubéreuses, de nouvelles plantations ont vu le jour en 2015. Cependant, seulement 1,5 hectares de terrain sont consacrés à la culture de cette fleur, et il faut environ 1 000 fleurs pour obtenir 1 kg d’absolu, ce qui en fait un ingrédient rare et prisé. Son absolu est donc l’un des plus chers au monde.

Si elle est majoritairement utilisée dans la parfumerie de luxe, la tubéreuse possède des vertus insoupçonnées lorsqu’elle est intégrée dans les produits cosmétiques. On lui reconnaît des bienfaits apaisants et relaxants similaires à ceux de la fleur d’oranger. Elle est donc idéale pour lutter contre l’anxiété et l’insomnie, mais elle possède également certaines molécules anti-inflammatoires.

Le néroli

Fleurs de bigaradier
Fleurs de bigaradier, ou oranger de Séville © Pexels : Rahime Gül

L’essence de néroli est obtenue à partir du bigaradier – citrus aurantium –, le même arbre qui fournit l’eau de fleur d’oranger lors du processus de distillation de ses fleurs. Malgré la popularité sans précédent de cette dernière, le néroli est encore méconnu. Son odeur est classée dans la famille des hespéridés, et non des fleurs. C’est la princesse de Nérola, Anne-Marie Orsini, en Italie, qui est à l’origine du nom « néroli », comme elle l’utilisait quotidiennement pour se parfumer.

Vallauris est la seule ville, avec la commune de Bar-sur-Loup, qui produit encore de la fleur d’oranger et du néroli en France. La quarantaine de producteurs présents dans la région vallaurienne utilisent une méthode ancestrale de distillation, afin de préserver les fleurs, connues pour leur fragilité : la distillation à la vapeur d’eau dans un alambic. Le nombre de bigaradiers en France, qui décroit depuis plusieurs années, rend l’essence de néroli rare et coûteuse : 5 à 6 tonnes de fleurs sont aujourd’hui récoltées chaque année, contre plus de 1 800 tonnes en 1912.

Le néroli est réputé pour être calmant, relaxant, et favoriser l’endormissement. Il est surtout utilisé en inhalation pour lutter contre l’anxiété, le surmenage ou les insomnies. On le retrouve seulement dans certains cosmétiques haut de gamme en raison de son coût élevé. Il aurait des vertus apaisantes et aiderait à calmer les rougeurs et inflammations, ce qui en fait un ingrédient idéal pour les peaux sensibles.

La mauve sauvage

La mauve sauvagemalva sylvestris – est appréciée depuis l’Antiquité. Il y a plus de 5 000 ans, les Chinois l’utilisaient déjà en tant que plante médicinale, et les Romains l’utilisaient au sein d’une préparation qu’ils appelaient omnimorbium et qui signifiait « salutaire pour toutes les affections ». Charlemagne avait même demandé à ce qu’elle soit cultivée dans le domaine royal, dans les monastères et dans les hôpitaux.

Cette plante à la couleur rose intense pousse à l’état sauvage en région tempérée, traditionnellement en Europe et en Asie. Il existe très peu de producteurs de cette fleur en région PACA. Ceux-ci sont dispersés dans toute la France, mais la rareté de l’essence de mauve font des produits cosmétiques qui l’intègrent dans leur composition des produits d’exception.

Elle est l’une des plantes qui possède les concentrations les plus riches en mucilages. Ceux-ci permettent notamment de lutter efficacement contre le dessèchement de la peau en formant un film protecteur qui maintient l’hydratation. La mauve apporte aussi un toucher doux à la peau grâce à ses vertus émollientes. Sa concentration en tanins lui permet aussi d’apaiser les irritations et inflammations fréquentes chez les peaux sensibles.

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L’immortelle

Fleurs d'immortelle
Fleurs d’immortelle © Pixabay : GoranH

L’immortellehelichrysum italicum –, aussi appelée « hélichryse » ou « plante au curry », tient ce dernier surnom de son odeur très spécifique, à la fois florale et épicée, qui peut faire penser à celle du curry. On la nomme « immortelle » pour sa capacité à se conserver très longtemps après avoir été coupée et séchée. Ses racines sont également capables de se régénérer à plusieurs reprises, supportant les conditions extrêmes des changements de saisons. Connue depuis l’Antiquité, ce n’est que vers la fin de XXe siècle qu’on commence réellement à l’utiliser pour ses vertus phytothérapeutiques

Originaire du sud de l’Europe, l’immortelle est rare lorsqu’elle est issue de cultures provençales, puisque sa culture est devenue très marginale. Elle fait aujourd’hui partie des espèces protégées en région PACA. On en retrouve surtout dans le Var, où autour de 3 à 4 tonnes de fleurs sont produites chaque année, principalement dans les communes de St-Cyr et d’Ollioules. On considère qu’un producteur qui possède un hectare de terrain pour la culture de l’immortelle peut en récolter entre 1,5 et 2 tonnes par an.

Les nombreuses vertus de l’immortelle la font s’intégrer très facilement aux produits cosmétiques : à la fois cicatrisante et régénérante, elle se révèle être une alliée contre les cicatrices, les varices, ou encore contre la cellulite. L’huile essentielle d’immortelle est aussi très efficace pour guérir les hématomes, et pour lutter contre les signes de l’âge. Elle aurait également des propriétés calmantes et apaisantes sur le système nerveux.

Le lys de mer

Le lys de mer – pancratium maritimum – est une variété de lys peu connue qui était cultivée sur les côtes méditerranéennes pendant l’Antiquité pour son aspect ornemental. Elle est aujourd’hui menacée d’extinction, et si certains producteurs tentent de la cultiver sous serre, elle pousse majoritairement dans son habitat naturel, dans les sols sableux et salins.

Les rares producteurs de lys de mer le cultivent biologiquement. On en retrouve à l’état sauvage dans le Parc National des Calanques près de Marseille. Son statut est menacé par les constructions, le tourisme de masse, mais aussi par le réchauffement climatique, en raison de ses fleurs qui fleurissent à la saison chaude.

Il est traditionnellement utilisé contre la tension artérielle, contre l’asthme, ou contre le paludisme. L’extrait de lys de mer est aussi reconnu pour réduire la production de mélanine à la surface de la peau, produisant un effet contre les tâches pigmentaires sans éclaircir la peau.

Le géranium rosat

Fleurs de géranium rosat
Fleurs de géranium rosat © Pixabay : JACLOU-DL

Originaire d’Afrique australe, le géranium rosat a été introduit en Europe au XVIIe siècle. Il a commencé à être cultivé à Grasse au XIXe siècle dès l’année 1845 avec les premières plantations de Demarson. C’est en 1819 que son essence a été extraite par distillation pour la première fois.  Il était à l’origine utilisé pour remplacer la rose, car il possédait une odeur qui s’en rapprochait beaucoup tout en étant bien moins coûteux.

La fleur est aujourd’hui encore cultivée à Grasse, et plus largement en Provence, aux côtés de la rose, du jasmin, ou encore de l’iris, même si elle reste minoritaire, car principalement produite à la Réunion en raison du climat plus favorable à sa croissance.

L’huile essentielle de géranium rosat est connue pour ses nombreuses vertus : cicatrisante, hémostatique, anti-inflammatoire, anti-bactérienne… Ces propriétés la rendent idéale en cas d’affections cutanées, de micro blessures, mais aussi de piqûres d’insectes. D’autant qu’elle a également le capacité de repousser les moustiques. On lui prête aussi des vertus anti-âge et rééquilibrante sur le système nerveux

Le narcisse des poètes

Le narcisse des poètesnarcissus poeticus – est une plante méconnue cousine de la jonquille. Originaire d’Europe centrale et méridionale, elle a été nommée ainsi en raison de sa symbolique, associée à la renaissance et au renouveau, concept qui intéressait particulièrement les poètes. Selon la mythologie grecque, cette fleur serait apparu après que Narcisse, un jeune homme fasciné par son propre reflet, se soit noyé dans une flaque d’eau.

Le narcisse des poètes est répandu dans les régions méditerranéennes et tempérées d’Europe. Il est présent à l’état sauvage dans les prairies des Alpes. Aucun producteur en PACA ne cultive le narcisse des poètes, celui-ci étant principalement produit en Aubrac. Il faut environ 1 000 kg de fleurs pour produire seulement 2 kg de concrète, transformés en 750 g d’absolue.

Le narcisse des poètes est la seule fleur sauvage qui est encore utilisée en parfumerie. Son odeur, à la fois florale et miellée, capiteuse et presque narcotique, est très recherchée des parfumeurs, aussi pour sa rareté. Le narcisse des poètes est également un actif très peu connu au sein des compositions cosmétiques. Il possède des vertus anti-âge, principalement en raison de son action contre les taches brunes, dont il atténue et limite l’apparition. 

La violette

Fleurs de violette
Fleurs de violette © Pixabay : Hans

C’est autour de l’an 1755 que la violetteviola odorata – s’est construit une réputation sur la Côte d’Azur. À l’origine, c’est la violette de Parme, essentiellement cultivée à Toulouse, qui était la plus populaire. Le parfum de cette fleur a une faculté intriguante et unique : celui d’être insaisissable et éphémère. En effet, en anesthésiant quelque peu les récepteurs olfactifs, l’odeur de la violette ne peut être perçue que temporairement par le nez humain, qui doit se reposer lorsque l’on souhaite la sentir à nouveau.

La ville de Tourrettes, près de Nice, est réputée pour sa variété de violette Victoria. C’est le seul endroit en France qui produit de la violette en tant que culture principale. Celle-ci est toujours de culture biologique. On peut également en retrouver à La Valette-du-Var. La rareté de son essence ainsi que son prix élevé sont liés au fait que les fleurs doivent se cueillir manuellement en raison de leur fragilité, ce qui induit un faible rendement.

La violette est majoritairement utilisée en parfumerie. Cependant, ce ne sont pas les fleurs qui sont utilisées, mais les feuilles ; le parfum des fleurs de violette étant impossible à extraire. Il en ressort une odeur verte et herbacée. En cosmétique, la violette possède des vertus purifiantes, antiseptiques et tonifiantes utiles en cas de peau à problèmes. Elle aurait également des propriétés calmantes pouvant servir à apaiser les maux de tête, et à lutter contre l’insomnie et la mélancolie.

L’iris

Iris signifie « arc-en-ciel » en grec. Selon la légende, les grecs auraient nommé cette fleur en l’honneur de la déesse Iris, qui, en tant que messagère des dieux, mettait en communication le ciel et la terre par le biais d’un arc-en-ciel. Son nom pourrait également provenir des reflets irisés de ses pétales. Elle est devenue l’emblème du royaume des Francs sous Clovis et orne les armoiries des Bourbons. On attribue ses premiers usages en tant que parfum à Catherine de Médicis.

La ville de Trets est la capitale européenne de l’iris. Elle est spécialisée dans la culture de l’iris pour la parfumerie haut de gamme depuis 1992, date à laquelle André Doudon a commencé à en planter dans la région. Depuis, un GIE, baptisé « Iris et Plantes de Provence », a été créé en 2020 pour la protéger. La maison Chanel a également décidé de cultiver l’iris à Grasse pour ses propres compositions.  On obtiendrait seulement aux alentours de 2 kg d’absolu pour une tonne d’iris, ce qui participe à son coût élevé, qui est presque aussi élevé celui de l’or.

Principalement utilisé en parfumerie, l’absolu d’iris est aussi cher en raison de la durée nécessaire à l’extraction du composé chimique parfumant situé dans les racines de la plante, qui est d’entre 5 à 7 ans après plantation. C’est en séchant les racines que ce composé, l’irone, finit par se révéler. Hormis ses propriétés parfumantes, l’iris peut être utilisé en poudre pour ses vertus nettoyantes et astringentes, sur les cheveux, mais aussi contre les gencives douloureuses et pour blanchir les dents.

Des fleurs aussi populaires que l’iris ou la violette, mais aussi méconnues comme le lys de mer ou le narcisse des poètes, possèdent toutes des vertus que l’on ne soupçonnerait pas. Ainsi, la région PACA recèle de bienfaits inattendus.

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