The Island List : la passion pour les îles européennes de Mélanie Habib (1/2)

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Flygskam : honte de prendre l’avion en suédois. Ce nouveau mot venu du nord nous fait prendre conscience des conséquences environnementales de nos déplacements aériens. Alors, pourquoi faire exploser son empreinte carbone ? Mélanie Habib est convaincue qu’il est possible de passer des vacances tout aussi dépaysantes et exotiques… sans aller à l’autre bout du monde. Son site theisland-list.com, contemplatif à souhait, nous invite ainsi à nous rendre sur les îles européennes. Elle revient pour nous sur la genèse de son projet…

Article rédigé par : ZIEL Jérôme

Depuis l’enfance, Mélanie manifeste une soif inextinguible de découvertes. Dans la petite ville de Province où elle a grandi, elle recherchait déjà le contact avec les expatriés. « Cela me fascinait d’aller à la rencontre de personnes portant en elles une autre culture que la mienne, moi qui ne connaissais que la France ».

Alors qu’elle n’a que six ans, sa mère la retrouve sur le quai de la gare : elle voulait prendre le train toute seule pour aller à Lyon, la grande ville voisine. « Découvrir le monde, pour moi, ne se résumait pas à admirer des beaux paysages. Cela passait aussi par la nourriture, les rencontres, l’observation de façons de vivre différentes ».

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Mélanie Habib (c) theisland-list.com

Mélanie Habib : une voyageuse dans l’âme

Pendant son adolescence, elle obtient que ses parents l’envoient en séjour linguistique… à Malte. De fait, l’île méditerranéenne est nettement plus sympa que la banlieue de Londres pour y apprendre l’anglais ! En 1996, alors qu’elle a 19 ans à peine, elle part vivre à Montréal. Là, tous les weekends, elle prend le train de nuit pour New York. Et en profite pour parcourir la ville de fond en comble. Au préalable, elle a pris soin de préparer son voyage par la lecture avide de ses bibles : Routard, Lonely ou Wallpaper. « Je ne m’intéressais pas nécessairement aux monuments. Je privilégiais plutôt les petits quartiers résidentiels où l’on pouvait vraiment s’imprégner de la ville et de la façon de vivre de ses habitants ».

Par la suite, dans sa vie professionnelle, elle travaille en agence de publicité et fabrique du contenu (photos, vidéos) pour le compte de marques de luxe. Elle côtoie alors des créatifs talentueux (photographes, réalisateurs) et cela l’incite à aiguiser son œil. Elle passe ainsi une grande partie de sa carrière à voyager, encore et toujours.

Cependant, avant même le confinement, elle ressent le besoin de ralentir le rythme effréné de ses déplacements. À l’époque, elle voyage tous les mois, parfois vers des destinations lointaines, pour ne rester sur place que peu de temps. Elle se retrouve alors bloquée en salles de réunions ou en studio, alors qu’elle ne rêve que de se promener dans les rues de ces villes étrangères. Et cela finit par créer une certaine frustration.

La méthode de Mélanie : se fondre dans le paysage

Quand elle ne voyage pas pour affaires, à son arrivée dans un nouvel endroit, Mélanie se pose, observe et attend. Petit à petit cependant, elle commence à faire connaissance avec les habitants, leur demandant leurs impressions sur leur île. Bien entendu, elle a déjà effectué ses repérages livresques en amont et elle a une idée approximative des endroits qui l’intéressent. Simplement, les locaux connaissent mieux leur environnement et ils ont des petits coins secrets à lui révéler.

Les îles qu’elle passe en revue sont généralement petites, aussi il arrive souvent qu’elle recroise les mêmes personnes. Ces dernières lui demandent alors ce qu’elle a pensé de leurs suggestions. « Alors que j’étais sur une île des Petites Cyclades en Grèce, se souvient-elle, une dame d’un certain âge me voit passer avec mon appareil photo. Elle me hèle. Je la suis dans le petit village. Elle me présente à son fils qui parle anglais. Il m’explique qu’elle veut absolument me montrer sa maison, l’ancienne école du village. Je me suis retrouvée à boire le café avec cette dame et son fils qui m’ont raconté qu’ils ne venaient plus que l’été car, désormais, ils habitaient Athènes. C’est ce genre de hasards qui font de vos voyages des expériences privilégiées ! »

L’Europe : un continent aux 1.600 îles

Il n’y a aucun chiffre officiel sur le nombre exact d’îles en Europe. Selon les sources, il y en aurait entre 1.350 et 1.600. Les méthodes pour les répertorier varient : certaines sources ne prennent en compte que les îles de plus de 20 habitants. Ces dernières seraient ainsi au nombre de 1.350. Nombre d’entre elles se situent en Suède ou en Norvège.

Il est possible de les localiser sur theisland-list.com, en promenant sa souris sur l’atlas intégré au site. Le continent y est représenté en blanc et les îles, en vert. À cause des différences d’échelle, Mélanie a eu du mal à toutes les représenter. Mais les principales y sont, y compris… le Péloponnèse, devenu une île à part entière depuis que le canal de Corinthe le sépare du continent.

The Island List : un site réalisé à quatre mains

Afin de parcourir l’ensemble de ces îles, Mélanie a joint ses forces avec celles d’un collaborateur, Richard. Ce dernier se charge des photos et du côté visuel du site, plus particulièrement. Comme elle l’explique, « nous avons travaillé ensemble pendant une dizaine d’années. Au moment où j’ai décidé de créer le site, il y a de cela un an et demi, j’ai voulu solliciter son point de vue, différent du mien, pour atteindre une certaine neutralité. En effet, nous sommes à l’opposé l’un de l’autre sur le plan des opinions, façons de vivre, etc. Or, je trouve l’échange et la discussion plus intéressants que la communauté d’esprit ».

Ainsi, Mélanie pense en termes de collectif. Elle aime bien échanger et partager. À l’opposé, Richard n’hésite pas à partir tout seul à l’aventure. Résultat : leur œil de photographe diverge. « On peut être au même endroit, à trois mètres l’un de l’autre, et prendre des photos complètement différentes. Je me contente généralement de prendre des scènes de vie. Richard, lui, prendra des photos plus techniques et artistiques (panoramique, grand angle). Il réalise aussi de nombreux portraits. Cela lui vient de sa formation de directeur artistique et de photographe ».

Ressentis de voyage

Quand Mélanie part sur les îles, elle n’y reste généralement que quatre ou cinq jours. Elle essaye par conséquent de s’en imprégner autant que possible pendant ce court laps de temps. Elle prend des photos et noircit les pages de son carnet de voyages.

Une fois rentrée, elle laisse reposer et infuser ses impressions de voyage. Elle commence par dérusher les photos, les siennes et aussi celles de Richard. Cela suppose un grand travail de sélection, pour ne retenir que les plus pertinentes. Les deux voyageurs discutent entre eux. Ils essaient de déterminer le ressenti de chacun, cherchant une ligne directrice commune. Ce fil rouge encapsulera leurs impressions de voyage, et leur servira à brosser le portrait de l’île.

En fin de journée, la chaleur écrasante disparaît avec l’arrivée du délicieux Favonio, le petit vent chaud dont Favignana tire son nom. L’autre visage de l’île, celui de la douceur, se dévoile alors.

Mélanie Habib (c) theisland-list.com

Par exemple, concernant Favignana, les deux co-voyageurs ont essayé de définir l’île en quelques mots : « l’île solaire ». D’une part, elle est située près de la Sicile : elle est donc très lumineuse et il y fait chaud. D’autre part, elle est très chaleureuse, du fait de l’accueil qu’on y reçoit. Autrement dit, elle est solaire dans tous les sens du terme. Généralement, Mélanie et Richard ne parviennent pas tout de suite à se mettre d’accord. Néanmoins, à force de rechercher une sensation commune, ils finissent par la trouver. « À partir de là, nous essayons de composer une histoire afin de raconter l’île, avec les images et le ressenti qu’on en a eus ».

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Île de Lanzarote, archipel des Canaries, Espagne (c) theisland-list.com

Retranscrire le souffle du vent

Quand elle écrit, Mélanie fait de courtes phrases. Néanmoins, elle ne donne pas à sa narration l’aspect d’un carnet de voyage. Elle préfère raconter des moments, des scènes de vie. Elle se focalise par exemple sur la « passeggiata », la promenade du soir typique en Italie. En fin de journée, tout le monde se retrouve autour de la place du village pour discuter, quel que soit son milieu.

Mélanie varie son style d’une île à l’autre, en fonction de l’impression générale qu’elle en a retirée. Si elle arrive sur une île très calme, quasi-déserte, cela se reflète dans son écriture. Elle n’a pas vraiment de méthode, se contentant d’encadrer son récit par une introduction et une conclusion. Elle raconte l’histoire de l’île en ayant recours à un style narratif et contemplatif.

Concernant les écrivains qui l’influencent, même inconsciemment, Mélanie fait référence à Albert Camus (Noces, L’Été). Car elle aime sa façon de retranscrire des sensations, des ambiances ou des atmosphères. « Ce que les photos ne peuvent retranscrire, je le couche sur les pages du web sous la forme de textes par lesquels je décris le souffle du vent, etc. »

(À suivre)

Plus d’informations sur : www.theisland-list.com

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