Interwiew : comment une sportive a géré sa grossesse ?

comment une portive a géré sa grossesse ?

Pour être maman, il faut passer par l’étape de la grossesse. Un moment important dans la vie d’une femme qui attend surtout son premier enfant. Dans la majorité des cas, donner la vie n’est pas de tout repos. En effet, la future mère peut traverser des phases difficiles pendant les 9 mois. Mais quant aux sportives, de quelles façons cet évènement bouleverse-t-il leur quotidien ? Mère de 2 enfants et capoeiriste, Tiphaine nous raconte avec ses propres mots son expérience concernant sa grossesse. Témoignage d’une maman sportive. 

Pouvez-vous vous présenter auprès des lectrices d’Ô Magazine ? Quel est votre niveau en Capoeira ? 

“Je m’appelle Tiphaine Nagou, instructrice d’école et enseignante de capoeira depuis une dizaine d’années pour les enfants et les jeunes. De plus, je donne des cours de Capo Fit (mélange de capoeira et de fitness) destinés principalement aux mères de famille qui veulent retrouver la forme. Surnommée Sussuarana ou Sussu, je détiens le grade d’instructrice en Capoeira équivalent à 15 ans de pratique dans la discipline. Au haut niveau, j’ai participé à plusieurs compétitions internationales avec des succès triomphants. En 2008, j’ai glané le premier championnat de Capoeira Fight féminin et remporté la médaille d’argent aux championnats du monde au Brésil, en 2009. Ensuite, j’ai obtenu le titre européen deux ans plus tard. À la suite de la venue de mes deux enfants, j’ai arrêté la compétition mais je suis invitée régulièrement à de nombreux évènements de Capoeira. À travers le monde et la France, je promeus et tente de contribuer au développement de ce sport et de mettre en lumière le niveau féminin qui est en plein essor”.

C’était un choix de tomber enceinte ?

“Avoir des enfants était un souhait de ma part. Cependant, je suis tombée enceinte pour la première fois dans un contexte délicat. Je m’entraînais 4 heures par jour même 6 heures à la capoeira. Certaines séances d’entraînements intenses se concentraient sur le corps à corps (jiu-jitsu brésilien), les coups de pied et les acrobaties. La capoeira est un sport très exigeant où il faut beaucoup d’investissement au quotidien pour progresser. À l’approche d’une compétition et ayant des projets de formations liés à mes études, j’ai dû stopper toutes activités pour me concentrer essentiellement sur la grossesse de mon premier enfant”. 

Comment avez-vous vécu vos deux grossesses ?

“Dans l’ensemble, j’ai bien vécu mes deux grossesses et c’était un réel plaisir de porter un enfant dans mon ventre. Que de bons souvenirs ! Sentir un être grandir en vous est une expérience formidable et une sensation unique. Pour le premier enfant qui est un garçon, le quotidien a été reposant avec quelques moments pour moi malgré quelques sautes d’humeur, normal, pour une femme enceinte. J’ai continué à donner des cours à mes élèves dont certains que j’ai vu grandi à travers les années. Pour ne pas rompre cette relation particulière avec eux, j’ai interrompu les entraînements au bout du huitième mois de grossesse. Évidemment, j’ai réduit le temps de cours afin de ne pas trop me fatiguer et parfois j’ai été remplacée par un collègue de confiance pour diriger les entraînements des petits et des jeunes. 

Néanmoins pour la seconde conception, à la venue de ma fille, il y a eu quelques complications puisque je suis tombée malade. D’ailleurs, à l’accouchement, j’ai beaucoup souffert et mis un peu de temps à m’en remettre. Je tenais quand même à faire cours pour mes élèves parce que je ne voulais pas “les abandonner”. Alors j’ai décidé de mettre un terme aux séances, deux semaines avant la naissance de ma fille”.

                                                               Source Photo : Parents.fr
Quelles étaient les difficultés que vous avez rencontrées ? avez-vous arrêté certaines addictions pendant la grossesse ? 

“Quand j’étais malade, j’ai arrêté le café pour ne pas risquer la santé de ma fille. De plus, je n’ai plus mis de parfum sur moi car je commençais à sentir des odeurs nauséabondes et fortes. Donc, j’ai cessé d’en mettre sur moi. Durant mes deux grossesses, j’ai fait attention à me nourrir sainement pour mon corps et surtout le développement du bébé. À part ces changements, je ne me souviens pas avoir eu beaucoup de problèmes au niveau du bébé. Cependant, j’ai ressenti probablement un manque de soutien et de compréhension du milieu sportif face à la grossesse.  

Malgré la gentillesse des gens, certains ont du mal à comprendre mon arrêt de la capoeira. Ils ne s’imaginaient pas qu’avoir un bébé puisse changer le rythme du quotidien et l’intérêt personnel d’une femme. Avant, je faisais des sorties pour des fêtes ou des évènements en lien avec la capoeira. Le jour où j’ai tout arrêté, cela n’a pas plu à certains. Je voulais m’enfermer dans mon cocon pour être tranquille et être avec des gens que j’aime. C’était égoïste mais j’avais besoin de calme. En tant maman, je préfère rester avec mon bébé que de sortir ou faire du sport.  J’ai entendu quelques remarques de ceux qui n’ont pas d’enfants comme : “Tu dis que tu reviens mais on sait que ça ne va pas être le cas”, “Ce n’est pas parce que t’as tes gosses qu’il faut arrêter de vivre”. Pour la plupart, ils ne conçoivent pas qu’il a des choses plus importantes dans la vie que ses prétentions personnelles. Ma maternité s’est faite dans mon jardin secret, pour autres femmes, la gestion est différente”.

Clémentine Sarlat, une journaliste sportive a témoigné auprès du média Brut, sur sa vie bouleversée par l’arrivée de sa fille. Elle a subi une phase de matrescence, une période courte et délicate juste après l’accouchement où la femme commence à devenir une mère. La jeune femme parle de sa solitude et d’un manque d’attention envers elle. Après la naissance de votre premier enfant, doutiez-vous de votre compétence d’être mère ? 

“Au début, l’apprentissage d’être maman était compliqué physiquement et surtout psychologiquement lors de la venue de mon garçon. On doute parfois de notre compétence en se posant plein de questions et on tourne en rond par rapport aux tâches répétitives pour le bébé qui deviennent très épuisantes : faire dormir le bébé, se lever en pleine nuit pour le coucher parce qu’il s’est réveillé et tutti quanti. J’éprouvais par moments de la mélancolie”.

L’entourage est essentiel pour le bien-être de la mère et du nouveau-né. De quelles manières, vos proches ont-ils été un véritable secours lors de vos deux grossesses ?

“Heureusement, je pouvais me reposer grâce aux nombreux soutiens. Avec une grande famille très impliquée qui m’entoure, je n’étais pas toute seule . Mes proches m’ont aidée pour mon moral et les tâches domestiques. En s’occupant et se focalisant sur les enfants, ils ont permis de me décharger de beaucoup de pressions au quotidien. La famille etait d’un véritable secours si on se confronte à des problèmes de la vie en général”.

Combien de temps il y a eu entre l’accouchement et la reprise de la pratique sportive ?  Avez-vous rapidement retrouvé votre niveau optimal ?

“Après la venue de mon premier enfant, je n’ai pas repris le sport. Je privilégiais l’éducation de mon fils au lieu de reprendre la pratique sportive qui est devenue secondaire. Je renoue progressivement avec sport un an et demi après l’accouchement de ma fille. Pas encore à mon niveau d’avant, je suis quand même ravie de reprendre même si j’ai encore quelques appréhensions concernant les coups à donner contre mon opposant lors de la rode (espace circulaire où deux adversaires s’affrontent)”. 

Aujourd’hui, comment vous gérez le rôle de mère et votre activité sportive ?

“J’essaie de concilier mon rôle de maman et le sport. Reprendre le sport est une chose bien difficile avec deux enfants au niveau de l’organisation, d’autant plus quand on est marié au professeur. En plus, je donne cours à plus de 200 élèves. Les semaines sont chargées avec mon poste d’institutrice, les enfants, le sport, et la gestion d’ une association sportive de Capoeira à Drancy. Quand vous voulez vous entraîner, le mari ne peut pas garder les enfants à la maison puisqu’il enseigne à ce moment-là. Donc, il faut trouver une autre solution pour remédier à cette complication. C’est souvent difficile à de se faire remplacer avec des enfants qui ont l’habitude d’être avec leur maman chérie. Actuellement, je trouve parfois le temps de pratiquer la Capoeira”. 

Selon votre expérience, quels conseils donneriez-vous à une femme sportive qui débute sa première grossesse ? 

“Il faut bien cibler ses objectifs pendant la grossesse. J’ai eu mon premier enfant à 29 ans. Avant, je dédiais beaucoup de temps au sport à travers divers évènements et compétitions avec des entraînements intenses par semaine. J’avais un rythme de sportive de haut niveau avec des ambitions. Quand la grossesse m’est tombée dessus, mes plans ont changé et se sont concentrés sur le bien-être du bébé. Pour une jeune sportive qui attend un premier enfant, il faut déjà avoir une alimentation saine, faire des exercices simples et bons pour le corps et le bébé pour rester active et tonique : la marche, la piscine (pour mon cas) …. Je conseille fortement à la personne enceinte qui veut continuer dans sa pratique sportive de ne surtout pas forcer son retour”. 

“Tout ce qui est fait par excès, peut avoir un impact sur la santé de la maman et de l’enfant. J’incite donc à être suivi d’un médecin pendant la grossesse. Mon dernier conseil pour la future jeune maman est de profiter de ce moment extraordinaire de sentir grandir un être dans son ventre. Bien qu’elles n’étaient pas programmées, mes deux grossesses restent des instants merveilleux gravés dans ma mémoire”.

Si vous vivez la même situation que Tiphaine, partagez votre expérience en commentaire afin d’aider les futures mères ou sportives souhaitant avoir un enfant.

Cet article a 2 commentaires

    1. Clinton Kieta-Sisidi

      Bonjour, Garcera

      La capoeiriste n’a pas pratiqué son sport lors de ses deux grossesses mais elle a fait des exercices physiques très simples tels que la marche pour ne être pas inactive et grader la forme. Merci de votre commentaire et bonne journée.

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